Chanteur, mais avant tout compositeur (pour lui et pour les autres), Jean-Jacques
Goldman est l'invité de Grand Amphi pour parler de la chanson, de son écriture, de ses
rapports avec la littérature, la poésie et la musique, de ses conditions de production,
du rôle et de la place du public.
Michel P. Schmitt - Commençons par une question tout à
fait triviale : qu'est-ce qu'une chanson ?
Jean-Jacques Goldman - Je vais d'abord la définir par ce qu'elle n'est pas : elle n'est
pas une poésie, elle n'est pas non plus une musique seule. Elle est un mélange de notes
et de mots, ainsi qu'un arrangement.
Michel P. Schmitt - La chanson est un genre qui n'a guère
droit de cité à l'Université, voire pas du tout. Prenons l'exemple du théâtre : c'est
aussi un genre mixte, qui a un texte et une mise en scène, on peut le jouer. Or, l'école
s'abreuve de textes de théâtre. Pourquoi l'école, et l'Université encore plus,
accordent si peu d'importance au texte de chanson ?
Jean-Jacques Goldman - L'école française a une attitude très particulière vis à vis
de la musique. A l'étranger, par contre, nos chansons sont beaucoup étudiées ; elles
servent à apprendre notre langue, comme les chansons anglaises nous servent à apprendre
l'anglais. La musique est plus naturelle dans notre pays ; un repas en France ne se finit
jamais par des chansons. Il y a aussi une spécificité de la musique, en tout cas celle
de mon époque... Dans les années soixante à Paris, il y a des pièces, du
café-théâtre. Alors qu'à Londres, il n'y a pas de café-théâtre, il y a des
comédies musicales.
Michel P. Schmitt - J'ai l'impression que la chanson est un
genre considéré définitivement comme mineur. N'y a-t-il pas, au-delà des
habitudes culturelles, un mépris à l'égard d'une forme d'art qui n'est pas légitimée,
qui n'est pas perçue comme un art noble ?
Jean-Jacques Goldman - Sur le plan des journaux, par exemple, c'est clair : il n'y a pas
de spécialiste.
Michel P. Schmitt - Il y a "Paroles et musique"
(1).
Jean-Jacques Goldman - "Paroles et musique", oui, mais ça n'existe plus. Il y a
une revue, qui s'appelle "Chorus" (2), qui reste de diffusion confidentielle.
Mais si on prend les grands journaux, les chroniques sur la chanson sont écrites par des
gens qui sont spécialistes d'autre chose, comme le théâtre ou la bourse. Oui, il y a un
certain mépris pour la chanson en France. |
Michel P. Schmitt - Si on se place du côté de la
réception, c'est bien pourtant la chanson qui a le plus d'audience. Il y a un divorce
entre ce qui est légitimé et ce qui est réellement consommé. La poésie, on s'en
abreuve à l'école, comme les textes de théâtre. Comment se fait-il qu'on pratique
cette poésie, qu'il y ait par ailleurs des poètes qui soient mis en musique (ceux que
reconnaît l'école : Baudelaire, Rimbaud, Verlaine...), alors que ceux qui écrivent
directement en "texte et musique" ne sont pas légitimés ?
Jean-Jacques Goldman - Il faut du temps. Ou alors qu'ils meurent. Comme Brassens (3), Brel
(4), etc. Je pense que des gens comme eux, qui sont maintenant considérés comme des
classiques, étaient très mal acceptés quand ils avaient vingt ans.
Michel P. Schmitt - Les gens dont tu donnes les noms sont
ceux que l'on cite traditionnellement quand on parle de la chanson française à texte, de
la chanson "Qualité France". Est-ce que tu appartiens à cette "chanson
française à texte" ? Toi, Cabrel (5), Jonasz(6), Souchon (7), etc. ?
Jean-Jacques Goldman - Il y a des cas très différents. Cabrel, par exemple, n'a pas tout
à fait la même place, dans le sens où c'est un type qui a été fondamentalement nourri
de musique américaine. Il met le son du mot avant tout. C'est une démarche qui n'est pas
spécifiquement française, contrairement à d'autres... Les héritiers directs de la
chanson française, c'est plutôt Souchon, Renaud (8), les gens pour qui le texte prime,
qui ensuite ont une musique. La démarche de quelqu'un comme Cabrel est différente ; le
son du mot prime le sens, d'une certaine manière. Moi, je me mets plutôt de ce
côté-là : ceux qui ont été éduqués d'abord par la chanson américaine, donc sans
compréhension. On pleurait en écoutant une chanson de Bob Dylan (9), absolument sans
savoir de quoi ça parlait. On était terriblement excités et terriblement émus par une
chanson de Jimi Hendrix (10) sans en connaître le sens. D'une certaine manière, le sens
nous gênait. La première démarche est une démarche de son, et je dirais de
sensualité. Ce n'est qu'en deuxième lecture qu'on peut éventuellement trouver un texte.
Ce qui est fondamental, dans la chanson, ce ne sont pas ses termes.
Michel P. Schmitt - Si la chanson anglo-saxonne a eu
l'importance qu'elle a eue, c'est moins parce qu'elle était dans une langue qui
s'appelait l'anglais ou l'américain, que parce qu'elle proposait des sonorités que
n'avait pas le français, et qui pouvaient correspondre à un certain type de musique.
Jean-Jacques Goldman - Il y a deux raisons : la première, c'est que les Anglo-saxons ont
incontestablement réinventé la musique. Tout ce qu'on entend actuellement est issu du
blues (11), du rock (12), du funk (13), etc. La deuxième, c'est que par hasard -par
hasard pour nous, mais pas pour eux- ils ont toujours eu une approche sensuelle de la
musique, une approche de plaisir. Alors que nous, nous avons toujours eu (depuis
l'histoire des grands de la chanson française) une approche de sens. Les gens qui jugent
nos chansons lisent le texte et disent que le texte est nul ou qu'il est bien. Il y a une
spécificité en France qui fait que le sens est très important. Le succès d'une
chanson, c'est sa musique, mais ce qui fait la fidélité à un chanteur, c'est le texte.
Ce qui fait que des gens comme Brel ou Brassens font carrière, qu'ils peuvent être admis
par nos particularités françaises, d'école, d'université, c'est qu'on y trouve autre
chose en deuxième lecture.
Michel P. Schmitt - Pourtant dans les albums aujourd'hui, on
trouve un fascicule avec le texte des chansons. Les gens fredonnent des paroles, il ne
fredonnent pas que des sons qui auraient vaguement une musicalité. Il y a des formules,
au moins dans le titre, au moins dans le refrain, qui font sens, qui sont reconnues comme
telles, et non pas seulement comme des sons !
Jean-Jacques Goldman - Je n'ai jamais dit le contraire ! Je ne suis pas en train de faire
un plaidoyer contre le sens dans les chansons ! Ce que je dis, c'est que dans la chanson
française traditionnelle, ça a été la seule façon de juger. Or, ça ne suffit pas.
Avant, on entendait : "Il y a longtemps que je t'aime, jamais je ne t'oublierai"
(14). Ce n'est pas un texte transcendant, mais avec la musique, c'est une belle chanson.
C'est comme la poésie. On ne lit pas une poésie comme un article de journal. Une
poésie, c'est une poésie. C'est aussi du plaisir. Je pense que les Américains,
quand ils chantent un blues, quand ils disent: "Don't leave me now", on ne
comprend pas immédiatement le sens. La fonction est sensuelle : celle de l'émotion,
celle de la danse. Elle est en dehors du sens, le sens intervenant en deuxième lecture
éventuellement. Même pas obligatoirement !
Michel P. Schmitt - Aujourd'hui, une chanson, ce n'est pas
seulement un texte et sa musique, mais tout un appareil technique l'enregistrement, le
pressage, le mixage etc ... qui sont autant de médiations entre l'auteur et celui qui
écoute. Tout ça est fondamental pour le sens même d'une chanson. Le "son"
d'une chanson est aussi important que sa musique proprement dite, ou que ses paroles.
Jean-Jacques Goldman - Ça va dans le sens de ce que je disais tout à l'heure. La chanson
doit amener de façon sensuelle une émotion, et pas uniquement une réflexion. Le son en
fait partie aussi.
Michel P. Schmitt - Une chanson dure environ trois minutes :
est-ce que ça ne limite pas le genre ? En France, les gens qui font des chansons de plus
de 3 mn ne sont pas très nombreux. Léo Ferré (15), peut-être. Pourquoi une durée
aussi courte ?
Jean-Jacques Goldman - En ce qui nous concerne, la raison extrêmement veule : c'est la
limite qui nous est laissée par les gens qui nous programment, par les radios et les
télés. Finalement, je pense qu'on s'est habitué à ce format, on l'a toujours connu.
C'est nous qui finissons par nous l'imposer, parce qu'on n'a jamais connu que ce
format-là. De temps en temps, on met une chanson de 35 secondes dans un album, ou une
chanson de 8 minutes, mais on sait qu'elle ne sera pas programmée.
Michel P. Schmitt - Y a-t-il une limite à l'attention du
récepteur de chanson ?
Jean-Jacques Goldman - On n'a jamais réfléchi à ça. Peut-être que ça correspond
inconsciemment à un degré d'attention possible chez les gens. De notre côté, c'est une
espèce d'autocensure, c'est la manière dont on a appris, en écoutant les Beatles (16),
Brassens, etc. |
Michel P. Schmitt - Il y a peut-être un rapport
avec la consommation rapide, le jetable. Est-ce que les chanteurs actuels ont conscience
que ce qu'ils chantent est immédiatement périssable, ou ont-ils le secret espoir qu'ils
entrent petit à petit dans une anthologie de la nouvelle chanson française ?
Jean-Jacques Goldman - Cette hiérarchie, qui la fait ? Prenons Souchon / Feldman (17),
par exemple. Qui fait la hiérarchie ? Les gens qui achètent les disques, ou bien la
critique et ce qui tourne autour ?
Michel P. Schmitt - Ceux qui chantent savent-ils s'il y a
déjà un public programmé pour les entendre ? Ou bien, y a-t-il une entité floue qui
s'appelle "le public" ? Est-ce qu'on met en concurrence des gens pour conquérir
ce public et lui faire acheter des CD ? Car on ne peut oublier l'aspect économique !
Jean-Jacques Goldman - Notre métier est extrêmement artisanal. Je ne dis pas ça dans le
sens bidon de : "Nous sommes des artisans", mais "artisanal" sur le
plan économique. Il n'y a pas d'études de marché. Aucune maison de disque n'est capable
de dire à qui que ce soit dans quelle direction aller. Ce sont les artistes eux-mêmes
qui sentent, souvent de façon très maladroite, ce qui marche. En général, ils se
plantent. C'est extrêmement mal fait, mais tant mieux.
Michel P. Schmitt - Composer une chanson n'inclut-il pas la
conscience qu'il y a des choses à dire ou à ne pas dire à son public ?
Jean-Jacques Goldman - Au bout d'un certain temps, surtout quand tu as un public très
particulier... Prenons le public de Renaud, par exemple. Quelqu'un qui a un public très
motivé, très cohérent, aussi. Sur le plan des idées, de leur reconnaissance entre eux.
je pense qu'à un moment, il doit se poser la question : "Est-ce que je vais dans le
sens de ce que ce public attend, de ce qu'il veut entendre ?" Est-ce qu'il a la
possibilité de changer, s'il veut changer ? Peut-il par exemple se dire, actuellement :
"Finalement, je pense que la social-démocratie, c'est une possibilité" ?
Est-ce qu'il a le droit, commercialement, de se dire ça, si un jour il le pense ?
Michel P. Schmitt - Rien qui soit de l'ordre de la
stratégie ? De l'adaptation à un public ? Quand on est enseignant, par exemple, il faut
s'adapter à son public, parce qu'il change, qu'il ne comprend pas tout, pas tout le temps
de la même façon...
Jean-Jacques Goldman - Il y a près de 60 millions d'habitants dans ce pays.
Quand tu fais ce que tu as à faire, ce que tu peux faire, ce que tu sais faire, ce que tu
fais bien, tu as un public autour de toi. Ça va de Dorothée (18) à Cabrel, en passant
par Renaud, ou MC Solaar (19). MC Solaar ne pourrait pas faire ce que fait Renaud, Renaud
ne pourrait pas faire ce que fait Dorothée, Dorothée ne pourrait pas faire ce que fait
MC Solaar. Et chacun fait son métier. Avec un minimum de talent et un minimum de succès
faciles à avoir, nous vivons de ça. A partir de ce moment-là, l'impondérable arrive :
Yves Duteil (20) par exemple, qui a le même style depuis vingt ans. Jusqu'à ce que, tout
à coup, il y ait une attente de ce style-là, qui fait que dans les années 79-80, tout
le monde s'intéresse à lui. Deux années avant, c'était Maxime Leforestier (21). Il y a
des gens comme Pow Wow (22) qui chantent a capella depuis longtemps et qui explosent tout
à coup. Un moment, c'est Patrick Bruel (23). Cette année, c'est Cabrel, qui fait des
disques depuis 1972-1973. Il a eu une carrière étrange, avec un noyau de gens qui ont
toujours reconnu son talent, sa qualité, et tout à coup il devient le chanteur grand
public de l'année. Le Bruel de l'année 1994 ! Pourquoi ? Est-ce qu'il a prémédité ça
? Je ne crois pas. Je crois qu'on va chacun dans une certaine direction, avec un passé,
une culture, avec tout ce qu'on est capable de faire ou de ne pas faire. De temps en
temps, il y a une espèce de vent qui souffle et qui fait que nous correspondons à ce que
les gens ont envie d'entendre. Est-ce qu'il est possible de programmer ça ? Peut-être.
Est-ce que nous le faisons, est-ce que quelqu'un est capable de le faire ? Non !
Michel P. Schmitt - Beaucoup de gens écoutent des chansons
et les connaissent par coeur, mais ils ne lisent pas de livres. Un des rôles de la
chanson aujourd'hui ne serait-il pas d'apporter à des gens qui ne les trouvent pas
ailleurs une morale, une philosophie, des formes de vie affective, les mots de l'espoir ou
du mal de vivre ?
Jean-Jacques Goldman - Elle peut jouer ce rôle et elle le joue souvent, parce que c'est
un vecteur facile. Parce que tous les mômes qui sont rebutés par la façon d'enseigner
les mots à l'école ont accès aux mots par la radio et par la musique, qui leur parlent
tout de suite. La chanson est un moyen utile. Il est sûr que c'est plus utile qu'Aubert
(24) leur parle des problèmes de la drogue que si c'est leur prof de fac ! (rires).
Michel P. Schmitt - Pourquoi y a-t-il, parmi les
consommateurs de chanson française, une telle disproportion entre le public
masculin et le public féminin ? Pourquoi est-ce que l'écrasante majorité de la
réception est du côté féminin, alors que l'écrasante majorité de la production de
chansons est du côté masculin ?
Jean-Jacques Goldman - On peut aller plus loin : le seul style de musique où le public
masculin est majoritaire, quasiment exclusif, c'est la musique la plus violente : le hard
rock (25). Cette différence existe aussi dans la lecture : Les femmes lisent plus que les
hommes. Il y a quelque chose de fondamentalement différent dans le besoin d'art et
d'émotion, une différence entre les femmes et les hommes dans la réception. Je ne crois
pas que ce soit spécifique à la chanson. |
Michel P. Schmitt - Peux-tu nous parler des
institutions musicales, par exemple de la SACEM (26). Frein, obstacle, adjuvant ? Elle
gère l'argent : quel argent, de quelle façon ?
Jean-Jacques Goldman - La SACEM, comme son nom l'indique (Société ou Syndicat, je
ne sais pas, des Auteurs Compositeurs), est un syndicat des gens qui écrivent des
chansons. Il récupère l'argent qui vient des radios, des théâtres, des cinémas, etc.
Quand vous allez au cinéma, et qu'il y a de la musique pour vous faire patienter, les
auteurs-compositeurs pensent qu'ils ont travaillé pour que vous restiez, et que le
cinéma doit payer ce service-là. En ce qui me concerne, je n'ai que des rapports
administratifs avec la SACEM : quand je fais une chanson, j'envoie une déclaration, je
leur demande si j'ai le droit d'utiliser ce titre ; ensuite je reçois les droits d'auteur
qu'ils ont collectés. Ils envoient de temps en temps des comptes en expliquant combien
ils ont touché, comment ils l'ont touché, et la quote-part qu'ils ont gardée pour les
frais d'administration.
Michel P. Schmitt - N'importe qui peut écrire une chanson
et l'envoyer à la SACEM ?
Jean-Jacques Goldman - Il faut passer un examen assez facile, montrant qu'on est apte à
écrire un texte ou une musique ; ou alors il faut avoir été joué ou enregistré. Un
disque, une pièce de théâtre, un spectacle vivant peuvent suffire. On peut signer un
contrat avec une maison de disques, et faire un disque sans être connu, simplement en les
ayant convaincus. Et on peut convaincre le directeur d'un bar de faire un spectacle cinq
ou six soirs ; je crois que ça suffit pour être adhérent de la SACEM, à condition de
pouvoir le prouver.
Michel P. Schmitt - Parle-nous des festivals, des
Francofolies (27), par exemple. C'est aussi de la promotion.
Jean-Jacques Goldman - Je ne suis pas un spécialiste. Je sais par exemple que les
Francofolies sont l'initiative d'une personne, appuyée par une radio et une ville. Le
problème est que ces manifestations ont un coût : la scène, les éclairages, le son,
les artistes, les musiciens, les logements, les hôtels... Les recettes (les billets
vendus) ne sont pas suffisantes pour faire exister ce festival, il y a donc besoin de
subventions pour combler le trou. Qui donne ces subventions ? Je sais qu'il y a les
conseils généraux, parce que c'est une action culturelle locale. Probablement le
Ministère. Le Printemps de Bourges (28), je crois, est énormément subventionné. Tous
les gens qui sont à la tête de ces manifestations, que ce soit Jean-Louis Foulquier (29)
pour les Francofolies ou Daniel Colling pour le Printemps de Bourges, sont des gens
extrêmement introduits : ils ont des métiers proches de l'institution, puisqu'il y en a
un qui travaille à France Inter (30), et l'autre qui est directeur du Zénith, qui a
été financé par le Ministère. Ce sont des officiels de la chanson française.
Michel P. Schmitt - De son côté, la presse spécialisée
qui parle de la chanson et des chanteurs est-elle une aide ou un obstacle ?
Jean-Jacques Goldman - Cette presse, d'abord, n'existe plus. Je pense que la France est le
seul pays dans ce cas. 0K Podium (31) et les autres sont des journaux qui s'intéressent
aux gens qui intéressent les lecteurs de 8 à 12 ans. Or, il est très troublant de
constater qu'il y a une dizaine d'années, c'étaient les chanteurs, et qu'aujourd'hui ce
n'est plus du tout le cas : quand on lit ces journaux, on y trouve les acteurs de séries
télévisées, etc. Ce ne sont donc pas de journaux spécifiquement musicaux. Et il n'y a
pas de journal traitant de la chanson. Les journaux comme OK Podium, c'est un peu le
Paris-Match (32), le Voici (33) des gamins, parce qu'il faut les entraîner très petits !
Mais ça ne parle pas de musique.
Michel P. Schmitt - Autour de la chanson il y a aujourd'hui
différents produits : le CD, les concerts, les clips... Quand on fabrique une chanson,
pense-t-on aux trois à la fois, à l'un des trois qui sera un produit d'appel pour les
deux autres ?
Jean-Jacques Goldman - Le rapport entre la scène et le disque est inconscient. Il
s'inscrit dans notre façon de composer, il s'y intègre. Le vrai problème, c'est le
clip. En France, les artistes qui marchent ont plus de quarante ans. Ces gens-là n'ont
pas été élevés dans le monde de l'image. Or, le clip est en train d'acquérir - ne
serait-ce que sur le plan économique - une importance fondamentale que nous prenons pas
en compte, nous, les artistes, parce qu'on n'y a pas été habitués, parce que ce n'est
pas notre monde. C'est peut-être un peu rébarbatif, mais sur le plan économique
l'enregistrement d'un album -les musiciens, le studio, etc.- coûte entre un million et un
million et demi de francs. Un clip coûte entre 500 000 F et un million de francs. On en
fait trois à quatre par album : le budget-clip d'un album est actuellement le double de
celui de l'album lui-même. C'est une chose qui nous dépasse complètement et que
personne ne gère. C'est arrivé doucement ; ni les maisons de disques, ni les artistes ne
réagissent, en particulier sur le plan de la diffusion et de l'image produite, qui est
une improvisation. Si la scène et le CD sont des conditions artistiques qui s'intègrent
de façon naturelle, parce qu'on y est habitué, la démarche du clip est une démarche
neuve. Très peu d'entre nous savent la gérer et s'en servir.
Michel P. Schmitt - Le clip apporte un sens qu'on n'avait
pas forcément prévu : c'est déjà une interprétation.
Jean-Jacques Goldman - Une interprétation qui nous trahit ! C'est un des grands
problèmes auxquels je me heurte : je ne suis jamais content des clips. Est-ce que ce
n'est pas une trahison de laisser la mise en images de ce qu'on fait à quelqu'un d'autre,
surtout maintenant que le clip acquiert une telle importance ? J'ai pris la décision de
m'impliquer beaucoup plus dans ce domaine, alors que je ne suis pas un type de l'image. Je
ne regarde pas la télé, je ne vais pas au cinéma ; c'est fondamentalement quelque chose
qui ne m'intéresse pas, et je crois pourtant qu'il va falloir que je m'y mette, comme on
doit se mettre à l'informatique musicale. Les artistes américains qui marchent ont en
général 25 ans. Ils sont nés dans l'image, ils ont une démarche et une relation
immédiate de la musique à l'image, ce en quoi ils ont une fois de plus de l'avance sur
nous. En France, il reste cette particularité du public qui s'attache au sens. Mais la
question en pose une autre : est-ce que le clip, même fait par l'auteur-compositeur, ne
trahit pas la chanson, comme un téléfilm ou un film trahissent un livre ? Est-ce que le
fait de mettre des images sur quelque chose qui est imaginé musicalement n'est pas une
erreur ? Ce qu'on peut faire, ce sont peut-être des clips où on est simplement en train
de chanter.
Michel P. Schmitt - Cette carence est-elle celle des
chanteurs, des auteurs - compositeurs ou des maisons de disques ? Est-ce que les
décisions viennent de vous ou des maisons de disques ? Est-ce que les albums de tout le
monde ont droit à autant de clips ? Comment fixe-t-on l'ordre des chansons d'un album
dont on fera un clip ?
Jean-Jacques Goldman - Depuis que je suis dans ce métier, je n'ai jamais vu une maison de
disques avoir la moindre idée de fond, je n'ai jamais vu une maison de disques créer un
artiste quel qu'il soit. On a l'impression que des chanteuses comme Dorothée ou Hélène
(34) ont été délibérément pensées.
J'ai rencontré le responsable de AB Productions, la boîte qui s'occupe de la tranche
horaire des enfants sur TF1, et qui est maintenant une très grosse puissance. Ces
gens-là n'ont jamais eu la moindre idée de ce qu'allait devenir le marché des enfants
à la télévision ; ils l'ont pris, parce que personne n'en voulait, et n'ont jamais
pensé qu'une tranche horaire quotidienne pour les enfants pouvait créer un marché
fondamental du disque. Personne ne l'avait prévu. Ce que les maisons de disques
faisaient, c'étaient des gens comme Anne Sylvestre (35). Mais personne n'a jamais pensé
: "On va prendre quelqu'un qui va passer à la télévision tous les jours et qui va
faire Bercy pendant un mois". Les maisons de disques n'avaient pas du tout prévu ces
phénomènes, elles les ont seulement constatés et entérinés, puis engrangés. Les
seules opérations dont sont capables les maisons de disques, ce sont des opérations
comme la Lambada (36), Clayderman (37). Là, ils savent qu'il y a un besoin, une
tradition.
Quant à savoir si tous les artistes ont accès aux clips, je dirais que ça dépend. Au
premier clip, oui, puisque c'est devenu une nécessité. Même un nouvel artiste ne peut
passer à la radio sans clip, ça fait vraiment partie de l'arsenal de base, comme
l'enregistrement. Ensuite, est-ce qu'il a droit à d'autres clips ? Cela dépend de
l'implication de la maison de disques, et du succès -ne serait-ce que du succès
d'estime- du premier titre. C'est un des problèmes principaux auxquels les maisons de
disques font face actuellement. Dans les conditions actuelles que leur imposent la
télévision et la radio, lancer un nouvel artiste constitue un investissement de plus
d'un million de francs, ce qui évidemment diminue de beaucoup les possibilités. Mais on
ne peut pas dire que les maisons de disques déméritent sur ce plan-là.
Michel P. Schmitt - Pour qu'il y ait investissement de
pareilles sommes, il doit bien y avoir des études de marché. Billy Ze Kick (38) n'a pas
été lancé sans savoir qu'il y avait un public.
Jean-Jacques Goldman - Il ne s'agit pas d'un phénomène préconçu et prémédité. Ça a
commencé à se passer autour d'eux, dans la région de Rennes, et les maisons de disques
ont suivi. |
Michel P. Schmitt - Et les paroliers, qui ne
chantent pas eux-mêmes, qui ne s'occupent pas de la musique ? Quelques uns sont
célèbres, Amade (39), Delanoé (40), Roda-Gil (41), d'autres encore. Existe-t-il des
différences fondamentales entre un auteur-compositeur, un auteur- compositeur-
interprète et quelqu'un qui n'est que parolier ? Voulzy (42) interprète ses propres
chansons et écrit pour Souchon. Quand tu écris une chanson pour Hallyday (43), pour
Patricia Kaas (44), est-ce que ça se passe de la même façon que quand c'est toi qui va
interpréter la chanson ?
Jean-Jacques Goldman - Il y a des contraintes et des libertés qui tiennent à la
personnalité de celui ou de celle qui chante. On a défini une chanson comme étant des
mots, des notes et une voix. Et une personnalité ! Quand Michel Jonasz dit : "Ne
m'oublie pas", ce n'est pas la même chose que quand Frédéric François (45) dit:
"Ne m'oublie pas". Pourtant, ça s'écrit de la même façon. Cette
personnalité fait que la chanson prend une signification différente en fonction de la
personne qui la chante.
Michel P. Schmitt - Mais que sait-on de la personnalité de
celui qui chante, si ce n'est sa voix ? Ecrire pour soi ou pour les autres, c'est
pratiquement la même chose, puisque dans les deux cas, on écrit pour une voix. Qu'est-ce
que tu préfères, toi ?
Jean-Jacques Goldman - Sur le plan personnel, je préfère écrire pour de grands
interprètes. Des gens qui sur le plan technique ont une voix extrêmement gratifiante, en
particulier pour la musique. Pour les mots aussi : il y a une façon de les dire, qui fait
qu'ils sont hors-jeu avec certains, et qu'ils passent avec d'autres. A partir du moment
où je ne me considère pas comme un interprète démesuré, je préfère écrire pour des
interprètes démesurés. Patricia Kaas, par exemple. J'aurais eu du mal à chanter
"Il me dit que je suis belle". Beaucoup moins crédible qu'elle !
Michel P. Schmitt - Qu'est-ce qu'il faut penser du terme de
"variétés" sous lequel on range souvent les chanteurs dont nous parlons depuis
tout à l'heure ? Est-ce que ça correspond à une esthétique qu'on peut définir ?
Jean-Jacques Goldman - Ce qui me frappe dans ce mot-là, c'est qu'il est d'abord
péjoratif. C'est tout ce qu'il est, d'ailleurs. Il veut dire que c'est de la variété
française, qui n'est pas du rock. La seule chose qui est claire, c'est l'aspect
péjoratif. "Variété", ça veut dire "fabriqué", "pas
naturel". En fait, ça veut dire "chanson - faite - pour - gagner - de -
l'argent", mais qui n'est pas naturellement inspirée du cri de l'être..."
Globalement, c'est un combat qui est en train de se terminer. Je n'entends plus beaucoup
parler de ça. Ça s'est beaucoup posé dans les années 80-85, quand on se demandait :
"Qui fait de la variété ? Qui fait du rock ?" Maintenant on ne se pose plus de
questions. Il y a trop de problèmes à résoudre. Il y a eu cette date fondamentale dans
l'histoire de la chanson française, quand Jerry Lee Lewis (46) est venu chanter à Bercy
avec Dorothée. Ça a beaucoup bouleversé les puristes !
Jerry Lee Lewis, Chuck Berry, c'est difficile de dire qu'ils ne sont pas des
rock'n'rollers. J'ai assisté à l'enregistrement d'une émission avec un duo entre Joe
Cocker (47) et Patricia Kaas. Je crois que ces choses-là sont en train de sombrer. C'est
une chose qui n'existe qu'en France. Quand Julio Iglesias (48) a décidé d'attaquer le
marché américain -il faut faire là-bas avec des parrains-, il a contacté un
Américain, une figure du country américain, Willie Nelson (49), il a contacté Stevie
Wonder (50), ils ont fait des duos ensemble. Ça n'a posé aucun problème. Alors que chez
nous, si Dorothée, qui a tous les moyens, qui peut obtenir Chuck Berry et Ray Charles
éventuellement, parce que tous sont fascinés par sa voix, demande à Etienne Daho (51)
de chanter avec elle, quelle que soit la situation financière d'Etienne Daho, quelles que
soient ses convictions, ça ne marchera pas. C'est un problème strictement français.
Public - Une chanson est-elle la rencontre d'un texte
d'abord et de notes ensuite, ou bien l'inverse ?
Jean-Jacques Goldman - Le cas le plus fréquent avant, c'était la rencontre d'un auteur
avec un compositeur. La plupart du temps, c'était un vrai travail. Je suppose que c'est
la musique qui demandait aux mots de se façonner par rapport à elle. Je pense que c'est
de cette alchimie, de cette rencontre que naît une mauvaise ou une bonne chanson, la
seule sanction étant le fait qu'elle touche ou ne touche pas les gens. Mais je suppose
qu'il y a de formidables textes dans des chansons qui n'ont jamais touché les gens. Il y
a peut-être de formidables musiques, sur des chansons qui n'ont jamais touché les gens.
Ce qui fait à mon avis les grandes chansons, c'est le mariage réussi entre ces notes et
ces mots. Il y a deux démarches différentes : on est au piano, à la guitare, et tout à
coup des thèmes musicaux viennent par bribes.
Et puis l'autre démarche : on est dans un train, on lit un article de journal, on parle
avec quelqu'un, et tout à coup on prend des notes en disant "Ça c'est un début de
chanson". Ensuite, il y a réunion entre les deux, qu'on essaie de marier. Donc deux
démarches différentes. Parfois des musiques restent toute seules sans trouver les mots,
parfois des textes restent seuls sans trouver de musique, parfois -c'est ce qui me fait
penser qu'il y a prééminence de la musique- la musique amène les mots. Par exemple une
chanson comme "Quand la musique est bonne" est une chanson où j'ai commencé à
dire : "Quand la musique est bonne" ; je ne savais pas du tout de quoi allait
parler la chanson.
Peut-être ne parlerait-elle finalement de rien, mais il est clair qu'une fois le texte
venu, on ne pouvait pas le changer. Si ça avait été par exemple . "Quand viennent
les varices", ça n'aurait pas été de chance, évidemment, je ne l'aurais pas
sortie, mais ça n'aurait pas pu être autre chose. Il y a des mots qui viennent
musicalement en dehors du sens.
Parfois, on doit adapter le sens à ça. Dans d'autres cas, j'ai une phrase musicale, je
cherche une rime ou un mot en "anche". Parce que la note fait qu'à ce
moment-là il va falloir le son "anche". Vous pouvez dire par exemple :
"C'était dimanche", et si vous dites : "C'était parti", ça ne sonne
plus. Il faut que ce soi "anche". Si tu ne trouves pas un sens avec ce son, il
faut changer de chanson, ça ne marche pas. Le son est très important ; un poète dira:
"Oui, mais tu es partiiiiiie!". Le son est absolument fondamental. Des notes
impliquent des sons et en refusent d'autres. Le premier qui a commencé à dire des textes
sur des chansons, ce fut Dylan. Un illustrateur de ça -qui d'ailleurs a puisé cent dix
pour cent de son inspiration dans Dylan (c'est vraiment son maître)- et que ça vaut le
coup d'écouter en ce moment, c'est Cabrel. Lui, il a complètement cassé ces histoires
de pieds, de structures qu'on s'impose et qui ne sont pas forcément nécessaires. Il a un
phrasé qui échappe totalement à ça.
Renaud aussi a fait ça de temps en temps. Ils échappent aux rimes, parfois. Même si,
dans le dernier album de Cabrel, "épaule" rime avec "alcool". Sur le
plan des pieds en tous cas, il a une liberté qui est extrêmement moderne. |
Public - Pouvez-vous définir votre public ?
Jean-Jacques Goldman - On ne choisit pas un public, on est choisi par lui. L'illustration
en est que ma première chanson s'appela "Il suffira d'un signe", la chanson la
moins adolescente que j'ai faite, et le public qui m'a choisi, qui a suivi cette chanson,
était un public exclusivement féminin, exclusivement entre douze et quinze ans. Il y a
des surprises, d'autant plus que je venais d'un groupe rock assez dur sur le plan de ses
choix.
Maintenant, comment définirais-je le public qui est resté ? Il y a une génération de
chanteurs, dont je suis un des derniers vivants puisque Michel Berger (52) et Daniel
Balavoine (53) ont disparu, et qui avaient la même formation. C'étaient des gens, comme
Voulzy aussi, qui au départ ne s'intéressaient pas à la chanson française
traditionnelle, et qui ont été nourris de musique anglo-américaine. On a tous fait
partie de groupes de rock au départ, on écoutait la musique des Beatles, de Jimi
Hendrix, des gens qui étaient au hit-parade à cette époque-là. Ensuite, on a essayé
de mettre des mots en français là-dessus. Si je veux définir le public qui nous a
suivis, je crois que c'est un public qui s'est intéressé à nous parce qu'on était les
seuls à faire ça. Maintenant il y en a beaucoup. Michel Berger en particulier a été un
des premiers à marier cette musique anglo-saxonne avec des mots français et
éventuellement un sens. Avant, les seuls qui s'inspiraient de cette musique-là,
c'étaient les Eddy Mitchell (54), Johnny Hallyday, Sylvie Vartan (55). Mais ils ne
faisaient que des covers de chansons anglaises sans textes originaux. Le public de Michel
Berger a une grande analogie avec le mien. Peut-être que je me trompe, je ne suis pas le
mieux placé pour en parler...
Michel P. Schmitt - Tu reçois beaucoup de courrier, tu
connais une partie importante de ton public à travers lui.
Jean-Jacques Goldman - Je connais la partie du public qui écrit, extrêmement
particulière... En général des gens qui se ressemblent beaucoup. Les gens qui écrivent
sont des gens vraiment à part. Quant au public des filles de 12-15 ans, il est passé à
d'autres. La chanson opère un rapport de séduction qui, par la force de années, se
modifie.
Public - Comment s'effectue le choix des chansons que vous
jouez sur scène ?
Jean-Jacques Goldman - Trois cas de figures. D'abord le plaisir. On vient de faire un
album, il y a certaines chansons qu'on n'a jamais jouées et qu'on a envie de jouer.
Deuxième chose, il y a des chansons qu'on a trop jouées, 150 ou 160 fois en concert,
plus les répétitions. Si on a la moindre sincérité, au moins le désir de sincérité,
on ne peut pas chanter une chanson quand on se dit: "Encore celle-là !", et
qu'elle nous gonfle.
Les gens ne vont à un concert qu'une fois tous les trois ou quatre ans, ils ne l'ont donc
entendue qu'une fois. Nous, on l'a entendue 400 fois et on l'a jouée 400 fois ! Ensuite
il y a des chansons qui sont chères aux gens et pour lesquelles on peut se faire
violence. "Il suffira d'un signe" est une chanson que j'ai chantée à tous mes
concerts, et dont je ne suis pas lassé. Mais "Comme toi", par exemple m'a
lassé assez vite, peut-être parce qu'elle demande beaucoup de soi quand on la chante.
J'ai dû la laisser pendant deux ou trois tournées pour avoir nouveau envie de la
chanter.
Public - Comment choisissez-vous les chansons qui vont être
mises en clips ?
Jean-Jacques Goldman - La question, plus largement, porte sur le choix de ce qu'on appelle
les singles, c'est à dire les chansons extraites de l'album qui vont avoir pour tâche de
le représenter. Dans la plupart des cas, c'est l'artiste qui choisit. Il n'y a pas trop
de pressions de la part des maisons de disques. Il s'agit d'un rapport de force : quand
vous avez du succès, et tant que vous avez du succès, les maisons de disques se taisent.
Quand vous avez des difficultés, elles donnent leur avis. Elles donnent parfois
leur avis avant, au sujet de la composition. Il faut choisir une chanson qui sera la
vitrine de notre album, celle qui donne une idée de ce qu'il y a à l'intérieur, tout en
gardant des possibilités de succès, puisque une chanson qui échoue fait échouer tout
l'album, même s'il est bien. Ce sont des contraintes strictement commerciales.
Michel P. Schmitt - Dans l'album "Rouge", la
chanson du même nom est-elle vraiment représentative de tout l'ensemble ?
Jean-Jacques Goldman - Aucune chanson de n'importe quel album de n'importe quel artiste ne
peut représenter parfaitement l'album. Mais une chanson comme "Rouge" montre
peut-être ce qu'il y a d'un peu différent dans cet album par rapport aux autres.
Public - Existe-t-il un pouvoir de l'auteur sur le public ?
Un chanteur a-t-il aussi une responsabilité de citoyen ?
Jean-Jacques Goldman - Je ne crois pas du tout à ce pouvoir-là. Les gens nous
choisissent, ils peuvent nous lâcher, nous n'avons pas le pouvoir de les contraindre.
J'ai un rôle de chanteur, non de gourou. Malgré le phénomène de fascination, au
moindre lapsus sur scène, la sanction est immédiate ; tu sens un courant d'air froid.
Nous n'avons aucun pouvoir à aucun moment. On peut se faire siffler la seconde d'après
une grande émotion. Je considère seulement mes disques comme des vecteurs pour les
autres. Je suis au service des gens, j'écris des choses qui peuvent éventuellement les
intéresser.
Public - Est-ce que vous avez une méthode pour élaborer
vos chansons ?
Jean-Jacques Goldman - Non, il n'y a pas de méthode. Ce sont des trucs qu'on apprend.
L'impro a aussi un rôle très important. On sait qu'il y a des rythmes qui marchent ou ne
marchent pas. La méthode est toujours démentie par l'expérience. En ce moment, je me
demande quel est le vrai rôle d'une chanson, en particulier si une chanson ne devrait pas
être uniquement une chanson d'amour. Quand une chanson aborde un autre thème, je me
demande si nous ne confondons pas avec la fonction d'un article de journal.
Public - Est-ce que la création artistique tient de l'inné
ou de l'acquis ?
Jean-Jacques Goldman - Tous les exemples de grands génies qui ont refondé la musique
montrent bien que c'est l'inné. La réponse va de soi.
Propos recueillis le 9 décembre 1994 |
(1) Le premier numéro de "Paroles et musique", "la revue
mensuelle de la chanson" fondée par Fred et Mauricette Hidalgo, paraît en juin
1980. Il compte 44 pages monochromes, coûte 13 francs et affiche Anne Sylvestre en
couverture. Ses objectifs sont de "faire reconnaître les véritables valeurs de la
chanson, française ou pas", de légitimer, dans une perspective socioculturelle
héritée des années 70, un genre considéré comme mineur par les institutions. Les
fondateurs, dans leur premier éditorial, affirment une "volonté de s'écarter du
star-system sans pour autant faire une revue marginale". La "chanson à
texte" - par opposition à la variété - est clairement privilégiée. Au fil des
ans, la revue s'ouvre à différents styles musicaux étrangers, mais la chanson
française reste dominante. "Paroles et musique" est repris à la fin des
années 1980 par "L'Evénement du Jeudi", auquel il emprunte l'ensemble de sa
maquette. Le dernier numéro paraît en mars 1990 : 84 pages, 25 francs ; Johnny Clegg
(artiste sud-africain engagé dans la lune anti-apartheid) est en couverture.
(2) Chorus, les cahiers de la chanson, se définit comme "la revue de référence de
la chanson francophone". Il prend la suite de "Paroles et musique" avec à
sa tête les mêmes directeurs, Fred et Mauricette Hidalgo. La revue paraît depuis
octobre 1992, le premier jour de chaque saison. Elle compte 200 pages et coûte 75 francs.
Eclectique dans ses choix, Chorus privilégie les articles de réflexion, les
"rencontres", les portraits d'artistes "de qualité".
(3) Georges Brassens (1921-1981). Auteur-compositeur-interprète français. En
s'accompagnant à la guitare, il a chanté des poètes (Villon, Aragon, Francis Jammes) et
ses propres créations : "La Mauvaise réputation", "Les Amoureux des bancs
publics", "Les Sabots d'Hélène", "Les Copains d'abord",
"La Non-demande en mariage"... Il connut le succès dès les années 50 et fut
considéré comme un "classique" à partir des années 70.
(4) Jacques Brel (1929-1978). Auteur-compositeur-interprète belge. Il obtint le prix
Charles-Cros en 1957 pour son album "Quand on n'a que l'amour". Ses chansons
mélancoliques et parfois caustiques ont rencontré le succès dès les années 60 et
Jacques Brel fut considéré comme un classique à partir des années 70. Ses titres les
plus célèbres sont "Ne me quitte pas", "Amsterdam", "La Valse
à mille temps".
(5) Francis Cabrel (né en 1954). Auteur-compositeur-interprète français. Révélé par
la chanson "L'Encre de tes yeux" en 1980, Francis Cabrel a su fidéliser un
large public au cours de sa carrière. Il connaît un immense succès avec son album
"Samedi soir sur la terre", primé aux Victoires de la Musique 1995.
(6) Michel Jonasz (né en 1947). Auteur-compositeur-nterprète français. Il connaît le
succès en solo dès 1974 avec "Dites-moi" et "Super nana". On peut le
définir comme un chanteur de jazz avec les albums "Du blues, du blues, du
blues" ou encore "La boite de jazz". Chanteur discret, il a su fidéliser
tout un public qui le suit dans La fabuleuse aventure de Mister Swing.
(7) Alain Souchon (né en 1945). Auteur-compositeur-interprète français. C'est à partir
de son association avec Laurent Voulzy, en 1974, qu'il rencontre le succès avec l'album
"J'ai dix ans". Ses chansons mélancoliques et tendres, "Allô maman
bobo", "J'suis bidon", "Y a d'la rumba dans l'air", ont
touché un public qui le suit fidèlement. Par ailleurs, l'immense succès de son album
"C'est déjà ça", peut s'expliquer par le fait qu'il y aborde avec un certain
désenchantement des sujets dans l'air du temps ("Foule sentimentale").
(8) Renaud : Renaud Séchan (né en 1952). Auteur-compositeur-interprète français.
Découvert par le public en 1977 avec l'album "Laisse béton", il est devenu le
chanteur des jeunes de banlieue au début des années 80 avec des titres comme "Dans
mon HLM", "Mon beauf", "Banlieue rouge". D'inspiration populiste
et contestataire, chacun de ses albums est très attendu par son public et rencontre le
succès. Il obtint une Victoire de la Musique en 1994, dans la catégorie musique
traditionnelle, pour son album en "ch'timi" inspiré par ses rencontres avec des
mineurs du Nord lors du tournage de Germinal.
(9) Bob Dylan : Robert Zimmerman (né en 1941). Auteur-compositeur-interprète, guitariste
et harmoniciste américain. Son premier album paraît en 1962. D'abord influencé par le
folk, notamment par Woody Guthrie, il évolue vers le folk-rock en électrisant sa
guitare. Porte-parole de la génération contestataire des années 60, avec des textes
sarcastiques ou poétiques, il poursuit depuis une carrière prolifique, abordant
différents styles tout en restant fidèle à ses racines. Malgré une activité
discographique plus faible depuis la fin des années 80, Bob Dylan, tout en se consacrant
au dessin et à la peinture, donne encore, au milieu des années 90, de nombreux concerts.
S'il n'est plus un personnage emblématique, il reste un artiste essentiel du rock, une
référence, dont une bonne partie de l'ouvre est déjà considérée comme
"classique". Parmi ses principaux albums : "Hiqhway 61 revisited",
"Blonde on blonde", "Subterranean homesick blues", "Slow train
coming", "Blood on the tracks", "World gone wrong", etc.
(10) Jimi Hendrix (1942-1970). Auteur-compositeur-interprète, guitariste noir américain.
Son style, marqué par le psychédélisme, révolutionna le blues et le rock et influença
de nombreux guitaristes. Sa version saturée du "Star Spangled Banner" (l'hymne
américain) au festival de Woodstock en 1969, et dont la signification pacifiste était
claire, est restée dans toutes les mémoires. Comme pour beaucoup d'artistes des années
60, sa mort tragique fit de lui un mythe. Le succès des disques récemment mis sur le
marché (rassemblant la plupart des enregistrements n'apparaissant pas sur les albums
originaux) montre qu'il reste un artiste extrêmement populaire, découvert par tout un
nouveau public d'adolescents. Ses principaux titres sont : "Hey Joe" (reprise),
"Voodoo chile", "Purple haze". Son album le plus célèbre est
"Electric lady land" (1968).
(11) Blues. A l'origine, c'est le chant des esclaves noirs aux Etats-Unis, l'expression
d'une condition existentielle et sociale malheureuse. Le blues, où le chanteur
s'accompagne à la guitare, se caractérise par une formule harmonique constante et un
rythme à quatre temps. Ce style musical, qui a sa propre histoire et ses évolutions
spécifiques, est construit sur trois accords et douze ou seize mesures. Il a été un
précurseur du jazz dans son ensemble et du rock. Quelques représentants : Robert
Johnson, Muddy Waters, John Lee Hooker, B.B. King. On retrouve l'influence du blues dans
de nombreuses chansons de Jean-Jacques Goldman, parfois même dans les titres : "Peur
de rien blues", "Un petit blues peinard".
(12) Rock : Le rock naît vers 1954 aux États-Unis. A l'origine, il s'agit d'une musique
de danse à prédominance vocale, issue du jazz, du blues, du rythm'n'blues noirs et de la
country music blanche, caractérisée par un rythme très appuyé sur le deuxième et le
quatrième temps et une utilisation systématique de la guitare électrique et de la
section rythmique (batterie et basse ou contrebasse). La plupart des artistes que cite
Goldman sont des pionniers du rock'n'roll. Aujourd'hui, le terme de rock s'applique à
toute musique populaire anglo-saxonne consommée en masse par un public jeune, et le mot
n'a plus grand sens. Il faudrait plutôt parier de "culture rock", de
"style rock", voire d'"attitude rock" (cf. la chanson de Michel
Berger, interprétée par Johnny Hallyday, "Rock'n'roll attitude").
(13) Funk : style musical apparu vers le milieu des années soixante-dix, issu du jazz
funky (style de jazz apparu vers 1960, dont l'inspiration puise aux sources de cette
musique) et de la soul music (musique populaire noire américaine dérivée du rhythm and
blues). Musique dansante, festive, à dominante noire, le funk se caractérise par
l'importance accordée à la voix, très énergique, aux cuivres et au rythme souvent
très marqué. Principaux représentants : George Clinton (seul ou dans des groupes comme
Funkadelic, Parliament ... ), Earth Wind & Fire, Prince. En France : FFF.
(14) "Il y a longtemps que je t'aime, jamais le ne t'oublierai" : refrain de la
chanson "A la claire fontaine", classique du répertoire populaire français.
(15) Léo Ferré ( 1916-1993). Auteur-compositeur-interprète français. Chanteur des
poètes (Apollinaire, Baudelaire, Rimbaud), cet anarchiste connut le succès dès 1955
avec ses propres titres comme "Le Temps", "C'est extra", etc. Il est
aujourd'hui un classique de la chanson française.
(16) The Beatles : Groupe pop britannique composé de John Lennon, Paul Mc Cartney, George
Harrison et Ringo Starr. De 1962 à 1970, ils contribuèrent, par leur immense
popularité, au succès de la musique pop dans le monde entier. Beaucoup de leurs chansons
-pour la plupart l'ouvre du tandem Lennon-Mc Cartney - sont devenues de véritables
classiques. En 1994, la réédition des mythiques albums "bleu" et
"rouge", et la mise sur le marché d'une compilation de leurs enregistrements
pour la BBC, furent d'excellentes opérations commerciales, prouvant que les Beatles
restent l'un des groupes pop les plus appréciés et une référence pour plusieurs
générations. Leurs principaux albums sont : "Revolve"r, "Sergent Pepper's
lonely hearts club band", "The White Album", "Abbey road".
(17) François Feldman (né en 1958). Auteur-interprète français. Il débute sa
carrière en 1986 et obtient de nombreux succès avec des chansons sentimentales,
réputées simplistes auprès des amateurs de la "chanson de qualité".
(18) Dorothée : Frédérique Hoschede (née en 1953). Interprète française. Elle a
débuté comme speakerine à la télévision avant d'animer des émissions pour enfants
(Récré A2, Club Dorothée). Ses albums séduisent un large public d'enfants.
(19) MC Solaar : Claude M'Barali (né en 1969, au Tchad). Auteur-compositeur-interprète
français. Il s'est imposé en deux albums comme un artiste extrêmement populaire,
contribuant à faire connaître le rap en France. Ses textes consacrés à des
sujets d'actualité, ses jeux sur les mots Inspirés par Queneau et Perec, son style
coulant, séduisent aussi bien le grand public que la critique.
(20) Yves Duteil (né en 1949). Auteurcompositeur-interprète français. Chanteur
"discret", Il eut du succès en 1977 avec l'album "Tarentelle" qui fut
prix Charles-Cros. Il est considéré comme un classique de la chanson française avec les
titres comme "La Langue de chez nous", "Le Petit pont de bois",
"Prendre un enfant par la main" (élue chanson du siècle). |
(21) Maxime Leforestier (né en 1949). Auteur-compositeur-interprète français.
Il a fait ses débuts en première partie de Georges Brassens dans les années 70.
Chanteur de la période "hippie", Il connut le succès avec des titres comme
"Parachutiste", "San Francisco", et son deuxième album
"Dialogue", où il évoque les vertus de justice et la lutte contre un monde
déshumanisé. L'album dont étaient extraits les titres "Né quelque part" et
"Ambalaba" l'a fait découvrir à un public jeune à la fin des années 80.
(22) Pow Wow : groupe de quatre chanteurs qui connut le succès pour ses reprises a
capella de "Le Chat", "Le Lion est mort ce soir". Leurs deux albums,
"Regagner les plaines" (1992) et "Comme un guetteur" (1993), sont
essentiellement composés de chansons a capella.
(23) Patrick Bruel - Maurice Benguigui (né en 1959, en Tunisie).
Auteur-compositeur-interprète français. Il a débuté au théâtre et au cinéma avant
de sortir son premier titre, "Marre de cette nana-là". Il connut véritablement
le succès en tant que chanteur avec son album "Alors regarde" (1989). Il fut
l'interprète numéro 1 du début des années 90, à l'origine d'un "phénomène
Bruel" qui a suivi le "phénomène Goldman".
(24) Jean-Louis Aubert (né en 1955). Auteur-compositeur-interprète français. Ex-leader
de Téléphone, l'un des groupes de rock français les plus populaires des années 70 et
80, il mène depuis une dizaine d'années une carrière solo couronnée de succès (albums
"Bleu blanc vert" et "H"). Ses textes expriment sa foi en l'homme,
dans un monde déboussolé.
(25) Hard rock. Genre de rock généralement bruyant et violent. A la fin des années
soixante, les pionniers du genre (Led Zeppelin, Deep Purple, Blue Oyster Cult ... ) jouent
une musique proche du rock, souvent influencée par le blues. Dans les années 70, Kiss et
Alice Cooper, entre autres, introduisent une dimension outrancière, volontiers provocante
et grand-guignolesque, qui influencera la plupart des groupes des années 80 (Iron Maiden,
Metallica, Megadeth, WASP... ), adeptes d'une imagerie macabre et obscène. Le genre s'est
diversifié en de nombreux styles parfois difficiles à distinguer, le plus extrémiste
étant le death-metal.
(26) SACEM. Société des Auteurs, Compositeurs et Editeurs de Musique. Société qui
contrôle et autorise l'utilisation des ouvres musicales en France et perçoit les droits
d'auteur. Elle assure la protection des ouvres dans une soixantaine de pays. La France est
l'un des pays où le pourcentage de droits d'auteurs perçu sur les recettes est le
plus important.
(27) Francofolies. Festival de la chanson francophone organisé depuis 1985, chaque année
au mois de juillet, à La Rochelle, par Jean-Louis Foulquier.
(28) Printemps de Bourges. Festival de musique créé en 1977 par Daniel Collinq et Alain
Meilland. Parmi les chanteurs français qui y furent accueillis, on peut citer Charles
Trénet, Jacques Higelin, Bernard Lavilliers, Gilbert Lafaille, Renaud, Diane Dufresne ou
Michel Jonasz. Chaque année, le festival sert aussi de tremplin à une sélection de
groupes régionaux.
(29) Jean-Louis Foulquier : animateur de l'émission "Pollen" sur France Inter,
fervent défenseur de la chanson française.
(30) France Inter : l'une des trois chaînes de Radio France, la société française de
radio-diffusion. Son programme national, partagé entre informations, émissions
politiques, culturelles, musicales, etc., est diffusé 24 heures sur 24 en stéréo.
France Inter est l'une des radios nationales généralistes les plus écoutées, et la
radio du service public qui compte le plus d'auditeurs.
(31) OK Podium (réunion de deux magazines, OK! et Podium) est un hebdomadaire composé de
photos et de reportages sur les chanteurs et les acteurs en vogue auprès des jeunes. Il
est en quelque sorte le descendant du journal des années 60 "Salut les copains"
qui fut le modèle de ce type de presse en France..
(32) Paris Match : magazine hebdomadaire fondé en 1945, qui se veut d'information
générale, bien connu pour son slogan "le poids des mots, le choc des photos".
Sa tendance actuelle le rapproche de "Voici" ou d'"Ici-Paris" plus que
d'un magazine d'actualité mondiale.
(33) Voici : magazine hebdomadaire, composé pour l'essentiel de potins sur les artistes
et autres personnalités connues.
(34) Hélène : Hélène Rolles (née en 1967). Actrice et interprète française. Elle
débute au cinéma à douze ans dans "Le Mouton noir", aux côtés de Jacques
Dutronc. Dans les années 90, elle obtient un immense succès avec la série
d'AB-Productions "Hélène et les garçons" (rebaptisée le miracle de l'amour),
diffusée par TF1. Elle mène parallèlement une carrière de chanteuse (chez AB
Productions, comme Dorothée), devenant l'idole de nombreux enfants.
(35) Anne Sylvestre : Anne Bengras (née en 1934). Auteur-compositeur-interprète
française. D'abord connue à travers ses chansons pour les enfants, elle obtint le prix
de l'Académie de la chanson française en 1962 et le Charles-Cros en 1967. Ses
titres les plus connus sont "Benoite", "Tiens-toi droit", "La
vache enragée", "Une sorcière comme les autres".
(36) Lambada : danse de type brésilien lancée par TF1 en 1989 avec le groupe Kaoma.
(37) Richard Clayderman. Compositeur et pianiste français, qui connut le succès au
début des années 80. Ses principaux albums sont "Ballade pour Adeline",
"Chansons d'amour", "Desperado".
(38) Billy Ze Kick : groupe rennais tirant son nom d'un roman de Jean Vautrin. Leur titre
"Mangez-moi", ode malicieuse aux champignons hallucinogènes, fut l'un des
succès inattendus de l'été 1994. Le groupe se serait séparé depuis.
(39) Louis Amade (1915-1992). Auteur français. Il fut préfet. Ses premiers textes de
chansons datent de 1948 ("Feu de bois", créée par Yves Montand). Il rencontre
en 1952 François Silly, futur Gilbert Bécaud. Cette collaboration ne cessera pas. On lui
doit entre autres les titres "La Ballade des baladins" (1953), "Le
Pays d'où je viens" (1957), "Les Marchés de Provence" (1958),
"L'Important c'est la rose" (1967).
(40) Pierre Delanoé (né en 1918). Auteur français. Directeur des programmes d'Europe
numéro 1 de 1955 à 1960, et ami de Jean Nohain, il collabora avec Amode et Bécaud
("Nathalie", 1964 ; "L'Orange", 1965). Il a ensuite travaillé avec
Hugues Aufray (pour qui il a traduit et adapté des textes de Bob Dylan), Nicoletta
("Il est mort le soleil", 1968), Michel Fugain ("Je n'aurai pas le
temps" 1967), Michel Polnareff, Michel Sardou, Joe Dassin ("L'Été Indien"
1975). Il est également l'auteur d'un recueil de souvenirs "La Vie en chantant"
(Julliard 1980). |
(41) Etienne Roda-Gil (né en 1941). Auteur français. Fils d'émigré catalan.
Après une licence de lettres, il se met à écrire des textes de chansons pour Julien
Clerc. Leur collaboration sera longue et fructueuse ("La Cavalerie",
"Niagara"). Ils se séparent au début des années 80. Roda-Gil en profite pour
écrire un opéra-rock, "36, Front populaire", qui restera à l'état de double
album. Il a également travaillé avec Catherine Lara et Mort Schuman ("Le Lac
Maieur"). L'album Utile de Julien Clerc les a à nouveau réunis. Il est
également écrivain ; son roman Ibertao (Stock) est sorti en mars 1995.
(42) Laurent Voulzy (né en 1948). Compositeur-interprète français. Compositeur des
musiques d'Alain Souchon, il connaît le succès en 1978 avec le titre "Rock
collection". Son album de 1986, "Belle-île en mer, Marie-Galante", obtient
tous les suffrages aux Victoires de la Musique. Sa tournée de 1994 fut un succès, mais
il s'est peu produit sur scène au cours de sa carrière.
(43) Johnny Hallyday : Jean-Philippe Smet (né en 1943). Auteur-interprète français.
Immense vedette du rock'nroli français et de la période des "yéyé" dans les
années 1960, il est connu pour des titres comme "Retiens la nuit",
"L'idole des jeunes", "Gabrielle", et plus récemment pour
"Quelque chose de Tennessee", ou encore "Laura". Il est le mythe d'une
génération et ses concerts sont de véritables événements (Bercy, Parc des Princes en
1993 pour son cinquantième anniversaire, etc.).
(44) Patricia Kaas (née en 1966). Interprète française. Elle fut révélée au public
en 1987 avec le titre "Mademoiselle chante le blues". Depuis son succès ne
cesse de croître en France comme à l'étranger. Ses principaux auteurs sont Barbelivien
et Bernheim. On trouve la chanson "Il me dit que je suis belle", écrite par
J.-J. Goldman, dans son album "Je te dis vous" (1993).
(45) Frédéric François : Franco Barracatto (né en 1950). Interprète français
d'origine italienne. Depuis les années 70, ses chansons d'amour rencontrent un large
succès auprès d'un public généralement féminin et plutôt âgé.
(46) Jerry Lee Lewis (né en 1935). Auteur-compositeur-interprète blanc américain.
Pionnier du rock'n'roll ("Great balls of fire"), il se rendit célèbre par la
destruction de ses pianos et par ses amours tumultueuses avec sa très jeune cousine.
(47) Joe Cocker (né en 1944). Interprète anglais. Avant de se lancer dans la musique, il
était plombier. Il participe au festival de Woodstock en 1969. Après la tournée Mad
dogs and Englishmen, victime d'arnaques et de divers abus, il connaît une longue passe
difficile, puis renoue avec le succès à partir des années 80, interprétant
principalement des classiques du rythm'n'blues.
(48) Julio Iglesias (né en 1944). Interprète espagnol. Ex-footballeur, c'est un
"chanteur de charme" du début des années 80 qui connut le succès avec les
titres "Vous les femmes", "Je n'ai pas changé". Emigré aux
Etats-Unis, on ne l'entend plus guère aujourd'hui en France.
(49) Willie Nelson (né en 1933). Auteur-compositeur-interprète blanc américain. Il a
écrit de nombreux classiques de la country music.
(50) Stevie Wonder (né en 1950). Auteur-compositeur-interprète, noir américain. Aveugle
de naissance, ce génie précoce de la soul music connaît ses premiers succès à treize
ans, sur le prestigieux label Motown. Dans les années soixante-dix, il exprime les
revendications de la communauté noire au travers d'albums comme "Innervisions"
et "Talking book", commentaires sociaux et appels à la paix, à l'harmonie
spirituelle, au respect de l'autre. L'année 1995 voit la sortie de l'album
"Conversation peace", après plusieurs années de silence. Stevie Wonder a
influencé de nombreux artistes.
(51) Etienne Daho (né en 1957). Auteur-compositeur-interprète français. Il incarne une
certaine "pop française" (dont les foyers sont essentiellement Rennes et Paris)
dans les années 80. On le découvre avec la chanson "Le Grand sommeil", qui
dénote un certain goût pour les références, cinématographiques entre autres. Suivent
des tubes chics et désinvoltes ("Week-end à Rome", "Tombé pour la
France", "Epaule Tatoo"). Il évolue par la suite vers une plus grande
profondeur ("Heures hindoues", "Saudade") sans renier sa subtilité.
Il a réussi à concilier l'accomplissement artistique et le succès commercial.
(52) Michel Berger : Michel Hamburger (1947-1992). Auteur-compositeur-interprète
français. Dans les années 60, il collabora six ans avec Véronique Sanson et écrivit
pour Françoise Hardy et France Gall. En 1979, il connut un immense succès avec
l'opéra-rock "Starmania" écrit avec Luc Plamandon. Sa carrière solo débuta
vraiment en 1980 avec le titre "La Groupie du pianiste". Son dernier album fut
en duo avec France Gall, son épouse, pour laquelle il n'avait jamais cessé d'écrire.
(53) Daniel Balavoine (1952-1986). Auteur-compositeur-interprète français. Révélé
dans l'opéra-rock "Starmania", il connut le succès au début des années 80
avec les titres "Le Chanteur", "Mon fils ma bataille". Ses derniers
albums traitaient des problèmes du Tiers-Monde. Il est mort au cours d'une mission
humanitaire en Afrique.
(54) Eddy Mitchell - Claude Moine (né en 1942). Auteur-compositeur-interprète français.
Il fut révélé dans le groupe "Les Chaussettes Noires" au début des années
60, avant d'entamer une carrière solo et de connaître le succès avec des titres comme
"Les Yeux menthe à l'eau", "La Dernière séance". D'inspiration
très américaine, chacun de ses albums rencontre un large public. Il fut le grand
récompensé des Victoires de la Musique en 1994 et 1995.
(55) Sylvie Vartan (née en 1944). Interprète française. Elle fut l'une des grandes
chanteuses de la période "yéyé". Elle connut le succès avec les titres
"Tous mes copains", Si je chante. Elle est en 1964 "La Plus belle pour
aller danser" aux côtés de Johnny Hallyday, qui était alors son mari. Dans les
années 80, elle s'installe aux Etats-Unis où elle rencontre le succès à Las Vegas.
Elle fait son retour en France à l'affiche du film "L'Ange noir", aux côtés
de Michel Piccoli. |
Jean-Jacques Goldman au travail
Premières années
1951 : Naissance de
Jean-Jacques Goldman.
Violon et piano pendant 10 ans. Lycée (Bac D) et études commerciales. Guitariste dans
des groupes de rock : Red Mountain Gospellers (un disque autoproduit en 1966), Phalanster,
etc. Première scène au Golf Drouot.
1975-1980 (avec le groupe Taï Phong)
:
1975 "Taï Phong", Album WEA -
Filipacchi Music.
"Sister Jane", extrait de cet album est un tube de l'été 75.
"For years and years" - "Out of the night" -" Fields of
gold" - "Goin'away" - "Sister Jane" - "Crest".
1977 "Windows", Album WEA -
Filipacchi Music.
"When it's the season" - "Games" - "St John's avenue" -
"Circle" - "Last Chance" - "The gulf of knowledge".
1979 Entrée de Michaël Jones dans le
groupe.
"Lastflight", Album WEA - Filipacchi Music.
"End of end" - "Farewell gig in Amsterdam" - "Sad passion" -
"Thirtheenth space" - "Last flight" - "How do you do".
1980 Dissolution du groupe.
(en solo)
1976 "C'est pas grave papa", 45
tours WEA - Filipacchi Music.
"C'est pas grave papa" - "Tu m'as dit".
1977 "Les nuits de solitude", 45
tours WEA - Filipacchi Music.
"Les nuits de solitude" - "Jour bizarre".
1978 "Back to the city again", 45
tours WEA - Filipacchi Music.
"Back to the city again" - "Laetitia".
1981-1989 (carrière
solo) :
1981 Rencontre de Marc Lumbroso.
"Jean-Jacques Goldman", Album CBS Epic.
"A l'envers" - "Sans un mot" - "Brouillard" - "Pas
l'indifférence" - "Il suffi d'un signe" -" J't'aimerai quand
même" - "Autre histoire" - "Quelque chose de bizarre" -
"Quel exil" - "Le rapt" - "Juste un petit moment".
1982 "Jean-Jacques Goldman", Album CBS Epic.
"Au bout de mes rêves" - "Comme toi" - "Toutes mes
chaînes" - "Jeanine médicaments blues" - "Veiller tard" -
"Quand la musique est bonne" - "Je ne vous parlerai pas d'elle" -
"Etre le premier" - "Si tu m'emmènes" - "Minoritaire" -
"Quand la bouteille est vide".
1983 Première tournée (novembre-mai).
Premier clip : "Au bout de mes rêves" (réalisé par Bernard Schmitt qui, par
la suite, en signera une quinzaine d'autres pour J.-J.G.)
1984 "Positif", Album CBS Epic.
"Envole-moi" - "Nous ne nous parlerons pas" - "Plus fort" -
"Petite fille" - "Dors bébé dors" - "Je chante pour ça" -
"Encore un matin" - "Long is the road" (Américain) - "Ton autre
chemin".
"Le Temps des Enfants" pour Danielle Messia, dans l'album Carnaval, Barclay.
Concerts à l'Olympia.
1985 "Non homologué", Album CBS Epic.
"Compte pas sur moi" - "Je te donne" - "Famille" - "La
vie par procuration" - "Parler d'ma vie" - "Pas toi" -
"Bienvenue sur mon boulevard" - "Délires schizo maniaco psychotiques"
- "Je marche seul" - "Confidentiel".
Participation au disque "Ethiopie" : Chanteurs sans frontières, Pathé Marconi
- Emi.
"Concert des Potes" à la Concorde, sous l'égide de SOS-Racisme.
Composition de la chanson des Restos du coeur de Coluche.
Concert au Zénith à Paris.
Nomination aux Victoires de la Musique.
1986 Chanteur de l'année aux Victoires de la Musique.
"Jean-Jacques Goldman en public", Album CBS Epic.
"Veiller tard" - "Compte pas sur moi" - "Envoie-moi" -
"Petite fille" - "Il suffira d'un signe" - "Elle attend" -
"Long is the road" (Américain) - "Comme toi" - "La vie par
procuration" - "Pas l'indifférence" - "Je te donne" -
"Pas toi" - "Sans un mot" - "Ton autre chemin" - "Je
marche seul" - "Quand la musique est bonne" - "Au bout de mes
rêves" - "Encore un matin" - "Confidentiel".
Réalisation de l'album "Gang" de Johnny Hallyday, Philips - Laura Hallyday
Productions.
"L'envie" - "Je t'attends" - "J'oublierai ton nom" -
"Toute seule" - "Je te promets" - "Laura" - "Tu peux
chercher" - "Dans mes nuits... on oublie" - "Ton fils" -
"Encore".
1987 "Entre gris clair et gris foncé", double album CBS Epic.
"A quoi tu sers ?" - "Il changeait la vie" - "Tout petit
monde" - "Entre gris clair et gris foncé" - "Là-bas" -
"C'est ta chance" - "Des bouts de moi" - "Fais des bébés"
- "Puisque tu pars" - "Filles faciles" - "Je commence
demain" - "Elle a fait un bébé toute seule" - "Quelque part,
quelqu'un" - "Qu'elle soit elle" - "Doux" - "Reprendre c'est
voler" - "Il y a" - "Peur de rien" - "Il me restera" -
"Appartenir".
Concert des Restos du coeur
1989 Composition des musiques des films "L'Union Sacrée"
(Alexandre Arcady) et "Pacific Palisades" (Bernard Schmitt).
"Traces", Album CBS Epic.
"Entre gris clair et gris foncé" - "C'est ta chance" -
"Reprendre c'est voler" - "Elle a fait un bébé toute seule" -
"Peur de rien blues" - "A quoi tu sers ?" - "Doux" -
"Long is the road" (gospel) - "Il changeait la vie" - "Il y
a" - (Medley) - "Puisque tu pars".
Concert des Restos du Coeur.
1990-1995 : Fredericks - Goldman - Jones
1990 "Fredericks/Goldman/Jones", Album CBS Epic, en trio avec
Carole Fredericks et Michaël Jones.
"C'est pas d'l'amour" - "Vivre cent vies" - "Né en 17 à
Leidenstadt" - "Un, deux, trois" - "Tu manques" - "Je l'aime
aussi" - "Chanson d'amour" - "A nos actes manqués" -
"Peurs" - "Nuit".
1992 "Fredericks/Goldman/Jones sur scène", Album Columbia -
Sony music.
"Nuit" - "A quoi tu sers ?" - "Il suffira d'un signe" -
"Un, deux, trois" - "Je commence demain" - "Peurs" -
"Je l'aime aussi" - "Là-bas" - "Vivre cent vies" -
"C'est pas d'l'amour" - "A nos actes manqués".
1993 Sous le pseudonyme de Sam Brewsky : "Il me dit que je suis
belle" pour Patricia Kaas, dans l'album "Je te dis vous", Editions Columbia
- Sony Music.
1994 "Rouge", Album Columbia - Sony Music. Avec en tirage
limité le livret Rouge, (Jean-Jacques Goldman, Lorenzo Mattotti, Sorj Chalandon),
Columbia - P.A.U.
"Serre moi" - "On n'a pas changé" - "Que disent les chansons du
monde ?" - "Il part" - "Juste après" - "Rouge" -
"Des vôtres" - "Frères" - "Des vies" - "Ne lui dis
pas" - "Elle avait dix-sept ans" - "Fermer les yeux".
Sous le pseudonyme de Sam Brewsky : "Est-ce que tu me suis", "Loin"
(paroles de J.J. Goldman/F. Pagny), "Si tu veux m'essayer", pour l'album
"Rester vrai" de Florent Pagny, Editions Polygram (Phonogram - Sony).
1995 Nomination aux Victoires de la Musique.
Réalisation de l'album de Céline Dion "D'eux", Columbia - Sony Music.
"Pour que tu m'aimes encore" - "Le ballet" - "Regarde-moi" -
"Je sais pas" (J.J. Goldman/J. Kapler) - "La mémoire d'Abraham" -
"Cherche encore" (E. Benzi) - "Destin" - "Les derniers seront les
premiers" - "J'irai où tu iras" - "J'attendais" - "Prière
païenne" - "Vole".
Fredericks/Goldman/Jones : "Du New morning au Zenith" (enregistrements publics),
Album Columbia - Sony Music.
Participation et réalisation de l'album "Lorada" de Johnny Halliday, Phonogram. |
Choix bibliographique
PAGES Christian et VARROD Didier, "Goldman, portrait non conforme", Editions
Pierre-Marcel Favre, Publi S.A., 1987.
GASSIAN Claude, "Goldman, album photographique", Editions Paul Putti, 1988.
AMINE Patrick, "Jean-Jacques Goldman", coll. "Rock & Folk",
Editions Albin Michel, 1988.
GILSON B., "Jean-Jacques Goldman, il change la vie", Editions Pré aux sources,
1992.
SÉCHAN Thierry, "Jean-Jacques Goldman ou la pensée frileuse" in Nos amis les
chanteurs, Editions Les Belles Lettres, 1992.
GASSIAN Claude, "Jean-Jacques Goldman, album photographique", Editions J.-P.
Taillandier, 1993.
SÉCHAN Thierry, "Narcisse et Goldman" in Nos amis les chanteurs : le retour,
Editions Les Belles Lettres, 1994.
CHALANDON Sorj, "GOLDMAN Jean-Jacques et Lorenzo MATTOTTI, Rouge", tirage
limité, 1994.
Choix vidéographique
Carnet de route, 1981/1986, Sony, 1987.
135 rendez-vous, CBS, 1988.
Traces, Sony, 1989.
Tournée des enfoirés, GCR, 1989.
Tour et détours, à paraître en 1995. |