LES ENFANTS DU ROCK :
Cliché avec retouches

(A2 - début 1985)


(retranscription :
Linda Delozier)

 


(Dans la cave de JJG).
"Je ne suis qu'un artiste de variétés et ne peux rien dire qui ne puisse être dit de variétés car on pourrait me reprocher de parler de choses qui ne me regardent pas" Léo Ferré.

(Dans la rue sur la musique de "Jeannine médicament blues").

JJG (au volant d'une voiture) : "Quand j'ai vu ce qui se passait, comment ça démarrait avec les histoires de hit parade, d'autographes, d'interviews et cætera, toute cette espèce de foire... j'me suis posé la question si... si fallait pas arrêter, si ça valait le coup de continuer et puis, je me suis dit "est-ce que j'étais prêt à 60 ans par exemple à sortir des vieilles coupures de journaux devant mes enfants ou devant des amis en disant "vous savez, si j'avais voulu, peut être que je serais devenu etc." et ensuite, j'me suis dit "de quel droit moi, j'me pose des questions sur une situation à laquelle tout le monde rêve et tout le  monde considère que c'est une grande chance...?" alors, j'ai foncé."
("Dust my blues" en studio avec MJ).

JJG (dans sa cave) : "J'me suis jamais vraiment posé de question sur ce que je faisais, sur la nature de ce que je faisais... bon, ensuite, j'ai entendu dire que par exemple une chanson comme - il joue "Sister Jane" - ça, c'est une chanson de rock'n roll et que, par exemple - il joue "Quand la musique est bonne" -ça, c'est une chanson de variétés... bon, c'est possible... moi, je suis pas vraiment un spécialiste. On écrit ce qu'on veut."

"La grosse chance pour nous les chanteurs, c'est que le public accède à l'intégralité de ce qu'on fait... Ils écoutent la chanson entièrement, toute la journée, à la radio ou à la télévision donc, ils n'ont pas besoin d'interprète pour leur expliquer que c'est bien, que c'est pas bien, que ça doit leur plaire ou que ça doit pas leur plaire. Ils savent très bien si ça leur plaît ou pas... ce qui nous met nous, beaucoup plus indépendant vis à
vis de tous ces gens qui savent et de la presse en particulier."

Look
JJG (dans une loge) : "Quand mon premier album est sorti, y'a des gens qui m'ont dit "ouais, c'est bien ce que vous faites, mais, qu'est ce que vous allez avoir comme look ?"... comme look ! je les ai regardé un peu atterré... un look ?... Ils m'ont dit "oui, regardez les chanteurs en ce moment, des gens comme Lacouture, les gens comme Lavilliers, c'est des gens qui ont un look"... Alors là, c'était vraiment... le ciel m'est tombé sur la tête, puis la date est arrivée de la première télé, alors, comme je savais pas quoi faire, bon, j'me suis lavé les cheveux pour faire plus propre, j'me suis mis une chemise propre, une cravate parce que quand même la télé... et puis, j'ai appris avec stupéfaction que j'avais un look."

Une femme dans son bureau (je pense qu'il s'agit d'Olivia Demachy, son attachée de presse à l'époque...) : "La presse jeune insiste beaucoup sur cette espèce de dégaine et c'est peut être ça, à la longue, qui lui donne cette image "gentille" (rire)."

JJG (en studio, plié de rire avec Jean-François Gauthier, son batteur) : "Pour moi, ce qui reste le plus important, le plus nécessaire et ce qui me fait le plus de plaisir, c'est de composer des chansons, de les concevoir. C'est pour ça peut-être que j'ai pas cette espèce de besoin viscéral de la scène que peuvent avoir beaucoup de chanteurs".

Claude Le Péron : "Salut, moi, je suis bassiste, j'accompagne Jean-Jacques... Mon truc, c'est la scène et vraiment, avec Jean-Jacques, j'ai l'impression de faire partie d'un groupe plus que d'accompagner un chanteur... et ça, les gens le ressentent et ils nous renvoient bien la balle."

Thierry Suc (organisateur de concerts) : "On a fait à peu près une centaine de concerts ensemble et y'a un truc qu'est vraiment très chiant, c'est quand il écoute à fond dans la bagnole ZZ Top et Yes... insupportable !"
(Clip "Encore un matin").

Claude Putterflamm (directeur studio et dandy) : "En général, il prépare ses  maquettes chez lui, il fait tout chez lui... il arrive en studio avec sa petite cassette... il fait écouter aux musiciens. Quand ils veulent apporter quelque chose, ou ça lui plaît et il le garde ou ça lui plaît pas et il le sucre impitoyablement."

JJG (en studio avec deux ingénieurs du son) :
- L'un d'eux :" Il est un petit peu chiant quand même."
JJG: "non, c'est pas vrai."
- "si, si".
JJG : "non, non, c'que je leur demande, c'est de jouer ce que j'ai fait mais, ils font ce qu'ils veulent.... enfin, j'veux dire, le son tout ça, j'les emmerde pas".
 - "oui, non, en fait, il est pas chiant".
JJG (riant) :"J'suis un petit peu chiant."

JJG (dans sa cave, à son synthé) : "Ce que j'ai entendu pas mal, c'est des histoires de romantisme, de romantique autour de mes chansons et ça, c'est un truc qui m'a un peu étonné parce que, si on regarde mes 7 chansons qui ont marché depuis 3 ans, y'a aucune chanson d'amour... alors, j'veux bien, mais, le romantisme, c'est quoi exactement ?"

(Dans sa cuisine, puis dans la rue, puis dans le métro sur fond de "Veiller tard").

Ruth Goldman : "C'était un enfant tranquille, il avait l'air d'avoir besoin de solitude de
temps en temps."

Catherine Goldman : "Il est un peu chiant, il est pas facile à vivre."

Ruth Goldman : "Il faisait tout sans conviction particulière : les études, la musique."

Catherine Goldman : "Il faut le prendre en bloc avec ses silences, ses absences."

Marc Lumbroso : "Peut-être qu'il est un peu trop timide".

Olivia Demachy ? : "Si pour vous "gentil" a la signification de brave, benêt, non, Jean-Jacques Goldman n'est pas gentil."

Mme Crevoisier, professeur de violon : "Oh, charmant, charmant à part qu'il ne travaillait pas suffisamment... d'abord il était très bien élevé, toujours aimable, toujours poli... mais il ne ma satisfaisait pas vraiment parce qu'il ne travaillait pas assez.
Alors, un enfant doué qui veut pas travailler, j'ai envie de... de l'étrangler tout de suite."

(Solo de violon "comme toi", extrait du clip).

(JJG dans l'église de la paroisse St Joseph de Montrouge).

JJG : "Bizarrement, c'est ici que je me suis déniaisé et que je faisais de la musique... j'devais avoir 14-15 ans...j'ai rencontré des copains qui jouaient du gospel et du vieux blues et qui m'ont entraîné là-dedans. Et là, j'ai laissé tomber le violon pour la guitare et j'ai commencé à jouer du gospel dans cette église."

Bernard Schmitt (qui réalise le reportage) : "Et ça te gênait pas trop à la messe, tu te sentais pas un peu seul... Goldman ?"

JJG : "C'est à dire, de temps en temps, j'me sentais un peu seul, effectivement...
mais, oh, j'étais pas le seul juif là dedans, y'en avait au moins un autre (il désigne la croix de JC)"

(Clip "Long is the road").

JJG : "Je crois pas qu'il y ait compromission à aller en télévision à partir du moment où on sait ce qu'on y fait et pourquoi on y va. Je crois pas que ce soit le lieu pour faire une performance artistique mais, ça reste un instrument fantastique de communication rapide avec beaucoup de gens... Pour ce qui est de faire de l'art..."

("Rain", dans l'église MJ/JJG).

JJG (faisant du tennis) : "Y'a une chose que je recherche pas, c'est ni la respectabilité, ni la légitimité, c'est pas des choses qui m'excitent vraiment".

"Pour moi, le grand privilège que m'a apporté le fait que ça marche, c'est de rencontrer des supers musiciens qui étaient des rêves pour moi : Guy Delacroix, John Helliwell ou Nono."
(En studio avec Nono et MJ sur "Minoritaire").

JJG (faisant du flipper avec Pinpin) : "Finalement, je me demande si la musique rock, qui était beaucoup plus qu'une musique au début, un ralliement contre le monde des adultes et contre un certain establishment.... je me demande si c'est pas devenu un nouvel establishment avec ses mythes, ses lieux communs, ses préjugés. Et puis, on
peut se poser des questions sur la prétendue subversivité du rock. C'est quand même la génération de Dylan qui a amené Reagan, la génération des Beatles qui a amené Thatcher et puis, j'me demande si la finalité de tout ça, c'est pas les Beatles décorés par la reine et puis Elvis à Las Vegas."

Pinpin : "Et Tchaïkovski avec Brejnev alors."

(En studio, suite de "Minoritaire").

JJG (face à une glace) : "Je doute que mes chansons passent à la postérité. D'ailleurs, ce n'est ni ambition, ni ma préoccupation, mais, par contre, je sais qu'elles existent aujourd'hui dans la vie des gens... et ça, c'est formidable. Et puis, quoi qu'il arrive, pendant trois ans, j'aurais été un chanteur à la mode." (il frappe dans la glace).

(Générique de fin : "Minoritaire").

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