Nous avons publié lundi le compte-rendu du concert de Jean-Jacques Goldman à Lille. Un concert fidèle à la tradition goldmanienne des petites idées, et de l'émotion intimiste servie par une grosse production. Nous terminons aujourd'hui une discussion avec le chanteur, amorcée à la sortie de son disque "En passant". - D'où est venu le thème de "En passant"? "Il y a un moment où on est dans une situation où on pense, à tort, que ça va toujours durer. Ceux qui ont construit les murs de Carcassonne pensaient que c'était pour toujours et aujourd'hui on met des panneaux "Ne pas toucher" car ils menacent de s'effondrer. Barjol, où je suis passé dans le cadre de la tournée des Villages, était un grand centre de tanneries qui sont aujourd'hui abandonnées. Les mineurs étaient mineurs de père en fils. Comme le travail, on commence à se dire qu'on ne va pas toujours travailler." - Et toi, la chanson, tu en feras toujours ? "Je sais maintenant, à cause de mon âge, que j'en ferai toujours. Et je sais déjà ce que je ne ferai plus. Je suis à moins de quatre ans des 50. John Lee Hooker, il chante du blues, la seule différence, c'est qu'il est assis. Mais je suis sûr que Mick Jagger se pose la question. Jagger sait qu'il sera rock-star toute sa vie, qu'il mourra rock-star. A un moment, je serai retraité, je ne ferai plus rien." - Un thème récurrent, dans toute ton uvre, c'est : avec toi, je partirai ailleurs..."Mon uvre, ça me fait toujours bizarre. C'est une licence. C'est une vision permanente que nous sommes des voyageurs, que tout a une fin. Que tous les havres dans lesquels on se réfugie sont des illusions. Certains n'ont pas cette sensation, ils pensent être immobiles, ils ne se rendent pas compte que tout doit passer..." - Tu es tout de même heureux de la façon dont les choses se passent pour toi... "Oui, j'ai de la chance. Ceci dit, j'ai des désirs assez limités. Je ne rêve pas d'être reconnu par exemple. Je me contente de peu, je ne suis pas dévoré par l'ambition. J'en connais beaucoup qui le sont." - Eric Benzi au fil des ans est devenu un complice de plus en plus incontournable... "Il est originaire de Marseille. C'était le clavier du groupe Canada. Ils avaient fait ma première partie, je ne sais plus en quelle année. J'étais devenu ami avec eux. Pour le premier album de Fredericks, Goldman et Jones, je cherchais un co-arrangeur pour les rythmiques et les sons. En écoutant des maquettes d'Eric, c'était ce que je recherchais. L'expérience fut tellement bonne que depuis, je n'ai pas arrêté de travailler avec lui. C'est un très bon claviériste et comme moi je m'occupe des voix et guitares, nous sommes autosuffisants." - As-tu encore un rêve à réaliser ? "Non, non, je ne suis pas un rêveur. Je suis déjà bien au-delà de ce que
j'aurais pu imaginer. Mon but a toujours été d'écrire des chansons pour les autres et
maintenant je peux choisir les voix que je veux, c'est vraiment très agréable." Propos recueillis par |