JEAN-JACQUES GOLDMAN
"Si j'ai encore envie à 75 ans,
je continuerais de chanter
"


(retranscription :
Aude)

 
JJG guitare.jpg (32521 octets)Pour la troisième fois, Jean-Jacques a repris sa guitare, direction les routes et les salles de France. Toujours passionné, jamais blasé, éternellement professionnel, il est six ans après ses débuts encore étonné de son succès.

Aux rendez-vous Live qu'il a fixé, les foules répondent présentes et lui se donne, donne, donne…

Chaque soir, c'est le plaisir qui fait vibrer la salle. Un plaisir partagé entre le public, les musiciens et l'artiste chanteur. Une onde de complicité mélodique passe et Jean-Jacques l'apprécie comme une chose neuve.

Voilà six ans déjà qu'il nous fait chanter mais si l'envie persiste, il nous reste encore quelques belles années musicales. Qui s'en plaindrait ? Pas nous. Mais tout de suite, pour vous, nous avons rejoint Jean-Jacques à Mulhouse et Auxerre. Un album photo rehaussé d'une interview pour faire comme si vous y étiez…

- Tu as pris le chemin de ta troisième tournée. Y a-t-il de grosses différences entre ces trois rendez-vous Live ?

Non, il y a seulement des différences de formes, pas de différences de fond.

- Tu ressens une évolution au niveau des contacts avec ton public ?

Non, pas avec la tournée précédente.

- Tu as l'impression que ce sont toujours les mêmes gens qui viennent, qui te suivent ?

Oui, il me semble. En tout cas, c'est le même genre de public, de réactions.

- Cela fait déjà 6 ans que tu fais partie de notre paysage musical, alors, Jean-Jacques Goldman, 6 ans après, comment se porte-t-il par rapport à ses débuts ?

Tu n'as qu'à regarder les photos du premier album et me regarder aujourd'hui ! Je crois que j'ai pris un coup de vieux…

- Mais dans ta peau, dans ta tête, tu te sens comment par rapport à tes débuts ?

Je pense que je me sens plus sûr de moi, de ce que je fais. J'ai plus de moyens. A présent, rien n'est impossible. Si je veux telle personne pour faire les éclairages, je sais que c'est possible. Si je veux tel guitariste, tel producteur ou tel studio, tout est possible. Ça c'est très confortable.


JJ-portrait3.jpg (12951 octets)- Tu dis que tout est simple, et en même temps, on ne te sait pas faire des choses extraordinaires, opter pour le tape à l'œil.

Ça dépend de ce qu'on entend par extraordinaire. C'est vrai que je n'ai pas fait un duo avec Mickael Jackson. Je ne sais pas s'il aurait accepté ou non, la question n'est pas là. Ce que je veux dire, c'est que ça ne m'excite pas beaucoup alors que faire un morceau avec Chet Baker par exemple, comme sur l'album précédent, moi je trouvais ça plus extraordinaire.

- Lorsque tu dis que tout est possible, tu penses musique. Mais dans la vie quelles sont les choses qui ont changées ? Tu ne roules pas dans une Cadillac rose, je crois…

Tout simplement parce que je ne trouve pas ça extraordinaire. Je comprends qu'il y ait des gens qui aiment conduire une Ferrari, il se trouve que ça ne m'intéresse pas. Les voitures.…bof ! Par contre, je peux te dire que j'avais besoin d'une vieille SG Gibson pour faire deuxième guitare et ça demande autant de mal pour la trouver qu'une voiture de collection. Je suis vachement content qu'on en ait trouvé une avec le même manche et tout ça. Chacun voit le luxe à sa manière.

- Tu as déjà extrait quatre 45 Tours de ton album "Entre gris clair et gris foncé", vas-tu continuer sur ta lancée ?

Oui, je pense mais je ne sais pas encore si ça va être des titres extraits de l'album ou de la tournée. Un peu comme on avait fait pour "La vie par procuration" qui était un titre de l'album mais qu'on avait fait Live. Je ne sais pas encore.

- Tu es en tournée pour de longs mois encore. Tu assumes complètement ce rythme infernal ?JJG loges.jpg (37237 octets)

Plus ou moins bien. Il y a des jours où ça va, des jours où on a le cafard. Je crois que c'est pareil pour tout le monde. Il y a des soirs où ça se passe bien, des soirs où on n'a pas senti.

- Il y a eu des moments où tu as eu envie d'arrêter ?

Oui, j'étais content de repartir aussi. Je crois que c'est pour tout le monde pareil, on est content de partir et au bout d'un certain temps, on est content de rentrer.

- Tu restes en général longtemps sans rentrer chez toi ou tu t'organise des aller-retour dès que possible ?

C'est plutôt ça. Quand on n'est pas loin de Paris, on rentre. Par exemple après Auxerre, il y a un jour off, alors j'en profite pour passer une journée chez moi.

- La réaction du public en tournée va t'influencer pour le choix de tes prochains 45 T ?

Disons qu'il y a des chansons comme "Il changeait la vie" ou "Peur de rien, blues" que je trouve bien, qui sont représentatives de l'album.

- On a eu l'impression de te voir moins souvent qu'avant à la télévision. Que s'est-il passé ?

Rien, j'en ai fait autant qu'avant, il y a eu une interruption avec "Là-bas" parce que Sirima n'était pas disponible donc je ne pouvais pas chanter avec elle. Ce qui fait que je n'ai pas fait de télé avec ce titre là mais sinon sur les autres, c'est comme avant. Bien sûr, je ne peux pas dire que faire des télés soit la chose qui m'excite le plus, que j'aime beaucoup ça mais j'en ai toujours fait un peu. Il y a une question de temps aussi.

- Actuellement, en tant que musicien, tu es comblé par ce qui se passe autour de toi, par ce que tu fais, par la réceptivité du public ?

Oh oui, c'est au-delà de ce que je n'ai jamais espéré, d'être écouté comme ça, que les gens ressentent aussi bien les choses que moi j'ai pu ressentir. C'est vraiment une sensation très positive.

- Est-ce que l'on prend l'habitude du succès ?

Peut-être un peu oui.


- On s'installe dans un certain confort. On n'a plus de peurs, de doutes ?

On est plus sûr de soi. Sûrement, c'est un fait aussi…

- On se dit que c'est parti, que ça y est ?

Non, on ne peut se dire que c'est pour toujours et que c'est une espèce de situation inamovible.

- Maintenant, si demain ça s'arrête, tu n'auras pas de problèmes de fin de mois ?

Oui, c'est vrai. Je n'ai jamais rêvé de ça, mais j'ai conscience d'avoir fait quelque chose d'inespéré, de bien et du mieux que je pouvais le faire. C'est déjà pas mal de pouvoir se dire ça, non ?

- Il y a quelques temps, tu me disais que tu ne ferais pas chanteur éternellement ?

J'ai dit ça, moi ? C'est-à-dire que je ne sais pas si dans dix ans, je ferais toujours la même chose. Ce qu'il faut, c'est avoir envie de le faire encore. Et si j'ai encore envie à 75 ans, je n'hésiterais pas à le faire. Ça dépend de ce que l'on recherche. Si c'est effectivement d'avoir une belle carrière, je crois que c'est plutôt souhaitable de s'arrêter à un moment. Mais à partir du moment où tu ne fais pas ça pour ça, et que tu le fais par plaisir, c'est différent. Moi, si j'ai encore du plaisir à chanter et qu'il y a encore des gens qui ont du plaisir à m'écouter même si c'est dans une salle de 300 places, je ne vois pas pourquoi je me priverai de cette chance.

- Tu disais aussi que le succès rendait le contact, la communication difficile. Est-ce qu'à présent, tu arrives à rencontrer ton public ?

Oui, mais j'ai toujours quand même rencontré des gens. Un petit peu, je continue. Ne serait-ce que quand je pars en vacances, en voyage, il m'arrive toujours de rencontrer quelqu'un dans un train, dans un avion ou dans un hôtel.

- Tu as pris des vacances récemment ?

Oui, je suis allé en Espagne. Comme tout le monde ! On dit que tous les Français passent leurs vacances en Espagne. Moi aussi !

- Tu as toujours enregistré tes disques en France. Tu n'as jamais été tenté d'aller voir ce qu'il se passait à Los Angeles, par exemple ?

C'est-à-dire qu'une fois qu'on est en studio, que ce soit à Los Angles ou rue des Annelets dans le 18e ou le 19e, c'est pareil. Donc ce qui change éventuellement, c'est l'environnement. C'est ce qu'il y a autour. Moi quand je suis en studio, j'y passe à peu près 12, 14 heures par jour, donc aller coucher chez moi ou à l'hôtel Hollyday Inn du coin… La seule chose qui éventuellement me tenterait serait d'aller dans des studios où je puisse dormir aussi. Ne pas avoir à rentrer chez moi, de façon à ne pas avoir de trajets, à être complètement dans le truc. Quand on est en studio, on ne peut rien faire d'autre. Rien ! On rentre à 2 heures, 3 heures du matin et on repart à midi. On a seulement dormi entre temps. Donc, il n'y a aucun intérêt à rester dans Paris et à baigner dans le quotidien. Je pense que ça peut très bien se passer dans des studios à l'extérieur où on peut rester une semaine en déconnectant complètement.

- Le grand sujet de discussion actuel, c'est "l'ouverture des frontières musicales", "les chanteurs qui s'exportent". Comment voyage la musique signée Goldman ?

Pour moi, ça ne marche pas dans les pays étrangers.

- Même dans les pays proches comme l'Italie ou l'Espagne ?

Heureusement parce que comme ça je peux encore y aller en vacances !

- Il y a eu des tentatives ?

Oui, il y a des gens qui se sont occupés de ça mais ça n'a pas marché. Ce n'est pas grave. Ce n'est pas une frustration. Je ne suis pas fasciné par le public américain ou le public allemand. Tu sais, moi, je suis déjà étonné qu'on m'aime bien à Belfort ou à Pau, donc, je ne suis pas étonné qu'on ne m'aime pas à Munich ou à Miami.


JJG piano.jpg (32116 octets)- En tant que chanteur, il y a encore une angoisse, un trac avant de monter sur scène ? Même si c'est le énième concert ?

Oui, quand même. C'est lourd comme spectacle, alors on ne peut pas être complètement déconcentré.

- As-tu assisté au concert pour Amnesty International ?

Non, j'avoue que six heures de musique, c'est trop long pour moi maintenant, donc c'est pour ça que je n'y suis pas allé. Sinon, je trouve que c'est une bonne idée, d'autant que c'était une belle affiche.

- Un journal très respectable a dernièrement titré sur sa couverture "La Génération Goldman". Qu'est-ce que veut dire "La Génération Goldman", que tu en es le leader, que tu la représentes, que tu lui ressembles ?

Non pas du tout. C'était simplement un mot dans un journal et comme tu le sais, il ne faut pas croire ce qu'il y a dans les journaux, je trouve que c'était ridicule et absolument pas fondé.

- Toi, tu n'as pas l'impression de coller particulièrement à l'image d'une époque ?

Pas du tout, en tout cas d'être le symbole ou le représentant d'une génération, dont je pourrais être le père d'ailleurs. Ils parlent probablement des gens de 14-15 ans et moi j'en ai 37. Donc c'est absolument ridicule de me considérer comme le représentant de ces gens-là avec lesquels je n'ai plus aucune relation.

- On parle beaucoup en 88 des chanteurs kleenex alors que toi, tu persistes. Parce que tu vas dans le sens du public ou bien parce que ton sens, c'est aussi celui du public ?

Je crois que ça a toujours été le cas, même à l'époque de Hallyday, de Gall, d'Eddy Mitchell ou de Claude François. Il n'y avait que ces quelques chanteurs qui arrivaient à se maintenir. Donc, il y avait aussi beaucoup de chanteurs kleenex qui passaient comme ça et dont on n'entendait plus parler. Je crois que dans chaque génération, il y a beaucoup de chanteurs qui arrivent, sur lesquels on fonde plus ou moins d'espoirs. Et puis, il n'y en a que 1 ou 2 ou 3 par génération qui réussissent à faire plus d'un disque.

- Alors quelle est leur force ?

Je crois que c'est un condensé d'un peu de talent, d'un peu de sérieux, de conscience professionnelle. Ce que j'appelle conscience professionnelle, c'est simplement l'amour et le respect de ce qu'on fait. Et puis comme 4e ingrédient, il y a la chance d'arriver au bon moment. Parce qu'il a beaucoup de chanteurs qui ont beaucoup de talent, beaucoup de conscience professionnelle, beaucoup de respect pour les autres mais qui ne sont jamais arrivés au moment où il aurait fallu qu'ils soient là. Donc ça, c'est une question de chance.

- Je crois qu'on peut dire que Goldman est une valeur sûre côté box office. Mais en chiffre, ça donne quoi ? Par exemple sur un 45 Tours ?

Mes 45 tours se vendent de 1 million à 150 000. C'est-à-dire que quand ça marche, ça se vend bien mais quand ça ne leur plaît pas, ça se vend dix fois moins.

- Mais tu n'as que très peu de bas depuis quelques temps ?

Il y en a ! Il y a une sanction immédiate en fonction de ce que les gens ressentent. Ce qui est sûr, c'est qu'un chanteur qui a eu du succès avant bénéficie d'une base de gens qui lui font confiance. Elle ne dépasse pas 50 ou 100 000 personnes, ce qui est déjà énorme. Donc, je crois qu'on est constamment appelé à être jugé par les gens. Que ce soit Nougaro ou n'importe quel grand, il faut qu'ils trouvent la chanson qui plaît aux gens, pour remplir les salles et pour vendre des disques.

- Est-ce que tu as le sentiment aujourd'hui d'avoir réussi ta vie ?

JJG piscine.jpg (36781 octets)(Silence). Je ne me suis jamais posé la question… J'avoue ne pas savoir… Je pense que quelqu'un réussit sa vie quand il a un but au départ et qu'il atteint ce but. Moi, je n'ai jamais eu de but.

- On a réussi sa vie quand on se sent bien dans sa vie, dans sa peau ?

Moi, c'est le genre de question que je ne pose pas et dont je me fous un peu ! (sourire)


- D'après toi, tu es plutôt un chanteur de variété, un chanteur populaire, un chanteur à messages ?

Un chanteur de variété actuellement populaire !

- Est-ce que tu as l'impression de progresser dans ton art ? Tu as, par exemple, acquis une technique au niveau de l'écriture… Est-ce que ce métier s'apprend ?

Je pense que ça doit s'apprendre mais je n'ai pas du tout l'impression de progresser. Je crois que j'ai progressé un peu sur le plan vocal. J'ai baissé de tonalités. Je hurle moins, c'est simplement de l'expérience. Sinon, c'est à peu près tout.

- La rentrée scolaire 88-89 est toute proche. Quels souvenirs t'ont laissé tes rentrées des classes ?

Des souvenirs très mauvais. Je n'aimais pas du tout l'école.

- Tu étais quel genre d'élève ?

J'étais un élève moyen, discipliné, qui passait très inaperçu. J'ai toujours souffert de l'école. Je ne m'y suis jamais adapté.

- Tu as fait des bêtises en classe, du style te faire attraper en train de copier ?

Non, j'étais plutôt sage, incapable de tricher, de sécher les cours. J'étais un très petit garçon jusqu'à 17, 18 ans.

- Sur les fiches de début d'année, qu'inscrivais-tu à côté de "profession souhaitée" ?

Je ne me rappelle pas. Mais je ne mettais pas musicien non plus. Comme je me connais, je devais marquer : "je ne sais pas".

- A l'heure où d'autres sont médecins sans frontière, pompiers ou chirurgiens, toi, tu es chanteur. Dans ta tête, tu te sens aussi apporter ta dose de baume au cœur des gens ?

Pas trop non, que ça puisse toucher les gens, que ça puisse les aider, que ça puisse effectivement leur donner du plaisir, sûrement. Mais je ne le fais pas dans ce but là. Moi, je le fais avant tout pour une thérapie personnelle. Ensuite si les médicaments marchent sur moi, éventuellement ils peuvent marcher sur quelqu'un d'autre. Mais je ne le fais pas en me disant : "Tiens, ça va leur faire du bien".

- Tu as reçu des preuves d'amour particulières de ton public ?

Je trouve que le fait qu'ils soient là, leur attitude pendant le concert, des lettres que je reçois…tout ça sont vraiment des preuves d'amour super sincères qui me touchent vraiment.

- Les premiers du Top 50 actuel sont assez différents : Elsa et Glenn Meideros, Début de soirée, David et Jonathan, qu'en penses-tu ?

Tu sais, moi je ne suis pas du genre à dire "ça c'est nul" ou "ça c'est formidable". Je trouve que "Début de soirée", quand tu es en boite et que tu l'entends, t'as vraiment envie de danser. C'est une chanson qui rend gaie. Je pense que les gens qui ont envie de se marrer un samedi soir n'ont pas forcément envie d'écouter un requiem de Mozart. Donc, il y a des musiques qui sont faites pour ça. Là, je crois qu'il y a un disc-jockey et un animateur de radio, alors ils savent faire de la musique pour danser et ils l'ont fait très bien. Moi, je trouve ça bien. David et Jonathan c'est pareil. C'est des chansons pour les vacances. Je trouve ça très agréable. Je crois pas qu'il faille forcer tout le monde à lire Nietzsche ou à écouter Génésis. Et, ils chantent pas mal les deux petits… Glenn Meideros, je trouve qu'il chante très très bien et la petite Elsa a l'air gentille aussi. Cette diversité dans les premières places ne me choque pas du tout. Je ne trouve pas ça du tout nul, si c'est ce que tu voulais me faire dire !

JJG affiche.jpg (28009 octets)- Là n'était pas mon but !

Ah bon, mais maintenant, il faut que j'y aille. C'est bientôt l'heure du concert.


Retour